Les “Manalas” : brioches alsaciennes pour Noël

Manala : brioche alsacienne en forme de bonhomme.

Moi, je suis persuadé que ce sont les « Manalas » et non le calendrier qui annonce la période de Noël.
Il en va ainsi depuis la nuit des temps, enfin du moins aussi loin que remontent mes souvenirs.
On dirait d’ailleurs que d’année en année, les « Manalas » sont de plus ne plus pressés car  ils apparaissent  un peu plus tôt dans les vitrines des boulangers et des pâtissiers.

Les « Manalas » sont des bonshommes en brioche.
Des bonshommes stylisés : un corps, une tête, deux bras, deux jambes et deux raisins pour faire les yeux.

Les Manalas ne venaient jamais seuls. Ils étaient accompagnés par des « Schnakalas » vite surnommés «téléphone» à cause de leur ressemblance. Les "telephones" ont disparu. Il ne reste plus que les "Manalas"

Nous prenions un grand plaisir à en déguster pendant la récréation, mais c’était un bonheur plus grand encore, quand on les dégustait pour le quatre heures. Alors, nous les trempions, la tête la première, dans un chocolat ou un cacao fumant.
Pas de Saint Nicolas sans « Manalas » et le 6 décembre jour de fête du Saint Patron, pour le repas du soir, toute la famille prenait place autour de la table pour déguster les « Manalas » de  notre fabrication.

 

Oh ! ils n’étaient peut être pas aussi beaux que ceux du boulanger !
Il y en avait des tordus, des bosselés, ceux qui avaient les jambes trop fines.
Mais personne, ah non, jamais personne n’a réclamé quand il tombait sur un « Manala » un peu plus gros.

Bien des années sont passées.
Quand mon travail m’a obligé à déménager dans le Nord, je n’ai emmené que l’essentiel, mes outils, mes livres et mes traditions.
La recette des « Manalas » faisait partie du voyage.

Je vous le jure, même à des centaines de kilomètres de mon pays, je n’ai jamais oublié de fêter la Saint Nicolas et c’était un grand bonheur que de partager mes traditions avec de nouveaux amis.

 

Recette des « Manalas ».

1 kg de farine type 55.
2 œufs.
1 œuf pour la dorure.
1 cube de levure de boulanger (40 g).
100 g de sucre en poudre.
100 g de beurre.
½ l de lait.
1 p de sel.

Fabriquons la pâte :

– faites tiédir très légèrement le lait. (trop chaud, il risque de tuer la levure)
– diluez la levure dans le lait tiède.

– mettre dans la cuve du batteur :

– la farine.
– le sucre.
– ajoutez les 2 œufs
– la pincée de sel

– faites tourner lentement.
 

– ajoutez le lait tiède avec la levure.
– laissez tourner.
– rajoutez le beurre ramolli (beurre pommade)
– la pâte est bonne quand elle se décolle de la cuve.
On peut la rectifier la consistance en ajoutant un peu de farine si elle est trop molle ou alors un peu de lait si elle est trop épaisse.
–  couvrez et laissez monter dans un endroit tiède, loin des courants d’air.
– quand la pâte aura doublé de volume, remettre le batteur en marche pour «  rabattre » la pâte.

Former les « Manalas »

C’est un peu le même travail qu’avec la pâte à modeler.

– divisez la pâte en boules de la même taille.
– prenez une boule.
– roulez-la en forme de boudin.
– formez la tête.
– incisez pour former les jambes.
– incisez pour former les bras.
– 2 raisins secs pour les yeux.

– laissez lever jusqu’à doublement du volume.
– pendant ce temps, préchauffez le four à 180° C.
– passez la dorure avec un pinceau.

– enfournez : grille position médiane
– laissez cuire et vérifiez la cuisson avec une pointe qui doit sortir sans trace de pâte.
– laissez refroidir sur une grille.

Commentaires du chef :

1 kg de farine devrait vous permettre de fabriquer une trentaine de «Manalas ».
Vous pouvez également fabriquer de grands bonshommes ce qui vous permettra de fignoler le décor avec des raisins secs, des amandes, des noisettes.

Bon appétit.

Et surtout, régalez vous.

Illsutrations photographiques :

Mon état de santé s'améliore mais il n'est pas encore suffisant pour me permettre d'envisager la fabrication des "Manalas"

Dès que possible, je prendrais quelques photos pour illsutrer cet article.

mannalas

Une armée de "Manalas" au ventre rond pour fêter la Saint Nicolas le 6 décembre.

 


 

“Berawecka de Noël

Le "Berawecka" gateau tradition alsacien.

Présentation :

Noël est certainement la fête la plus importante de l’année dans les pays de l’Est, et l’Est commence dès que l’on franchit la ligne bleue de Vosges.
Au fur et à mesure que l’on approche de la période de Noël, les villes s‘habillent de lumière, les marchés de Noël s’installent sur les places de villes et des villages, et dans les vitrines des boulangers pâtissiers, apparaissent des fabrications que l’on ne trouvent qu’à cette période-là.
Ces sont les « Mannalas » qui débarquent en premier. Les « Mannalas » sont des bonshommes en brioche que l’on déguste avec un peu de beurre. On les trempe souvent dans un chocolat ou un cacao bien chaud. C'est également la période des "Bredala", les petits gâteaux fabriqués par les ménagères.

Vous apercevrez aussi  les fameux «Beerawecka » : les pains aux fruits.
Passé Noël, toutes ces friandises disparaîtront pour revenir l’année suivante, comme par enchantement.

Un peu d’histoire :

On raconte bien des histoires sur l’origine de ces « beerawecka ». On essaie de justifier une origine et certains se tournent tout naturellement vers la linguistique.
« Beera »  désigne la poire.
« Wecka » signifie le pain enfin une forme de pain pour être plus précis.
« Beerawecka » serait donc tout naturellement l’association des deux mots et signifierait le pain aux poires et par extension le pain aux fruits.
Cela semble logique donc véridique.

Malheureusement, il n’en est rien !

Voyons cela d’un peu plus près.

L’Alsace a toujours été une terre de passage. La région est même un passage obligé des migrations Nord Sud. Or, parmi les gens qui étaient obligés de fuir, il y a ceux qui étaient poursuivis pour des raisons religieuses. C’était le cas des « juifs ». Mais, comme je vous l’ai dit, l’Alsace est une terre accueillante et de nombreux juifs se sont installés dans la grande vallée entre les Vosges d’un côté et la Forêt Noire de l’autre. L'Alsace terre de tolérance, terre œcuménique.

Ces gens là parlaient une langue appelée « yiddish » qui comprend beaucoup d’emprunts aux langues et dialectes locaux.

Les juifs, peuple qui voyage, ont des traditions bien ancrées. Et quand on voyage, on emporte avant tout des choses indispensables, des choses pratiques, nourrissantes. C’est ainsi qu’ils fabriquaient des gâteaux pour le voyage. On mettait dans ces gâteaux, des choses nourrissantes comme des fruits secs parce qu’ils se conservaient facilement.

C’est en souvenir de ses voyages, que pour le peuple juif, Pâques est la fête la plus importante.
Pâques   se dit Pessa’h

Le gâteau de Pâques : Pessa’h wecka.
Voilà la vraie origine.
Mais à force de se cotoyer, les traditions se mélangent et les chrétiens ont repris à leur compte le fameux gâteau qui de Gâteau de Pâques est donc devenu gâteau de Noël.

Le Beerawecka a conquis tous les pays de l’Est parce que sa fabrication n’est pas difficile. On en trouve, dans toute la vallée du Rhin, en Autriche, en Suisse. Il comprend des fruits secs que l’on pouvait préparer soi-même en séchant des fruits au moment des récoltes. De plus, le gateau présente l'avantage de se conserver longtemps.

Mais attention aux mots :

Ils changent dès que l’on fait quelques kilomètres.
Dans le Haut-Rhin, on dit Beerawecka. ( avec 2 e)
Dans le Bas Rhin, on dit Berewecke.( 1 seul e)
Sauter parce dessus le Rhin et l’on vous parlera de Hutzelbrot.  
«Hutzl" désigne à la fois les  poires sauvages dures mangeables à condition de les cuire longtemps, ou les fruits des conifères.
Dans la vallée d’Orbey, où était venue de réfugier le peuple  Welche (apparenté aux Basques) on parle de Hogey et du côté de Munster on appelle le Beeraweacka «Schnitzwecka ».
Mon ami Joseph, grand féru d'histoire alsacienne, et plus particulièrement d'histoire de la province du Sud : le Sundgau, m'a rappelé que jadis, les juifs du village étaient les grands spécialistes de la préparation des Beerawacka. Chaque année, pour nouvel an le parrain offrait un Beerawecka comme cadeau.

C'est donc parce que le Beerewecka est si populaire, si estimé, que les gens l’ont adopté et lui ont donné un nom.
A bien regarder, la fabrication des Beerawecka est simple.

– des fruits secs
– une pâte fortement épicée.

Avec si peu de renseignements, ne vous étonnez donc pas, si les variations de recettes sont innombrables ; chacun étant d’ailleurs persuadé de détenir la vraie recette.

Comme je vous l’ai déjà souvent rappelé, inutile de chercher la vraie recette originale. Chaque  ménagère faisait avec les ingrédients qu’elle avait sous la main. De plus, les recettes se transmettaient de bouche à oreille, rien d’écrit, rien de figé, et chacun pouvait donc les adapter à son goût.

Voyons la recette :

Au départ : des fruits secs, souvent fabriqués soi-même.
En automne, quand il y a trop de fruits, on essaie de les conserver.
On coupe les pommes et les poires en tranches que l’on fait sécher.
Les quetsches sont dénoyautées et séchées mode pruneaux.
On réserve quelques belles grappes de raisin que l’on suspend afin qu’ils sèchent.

Et puis,  se rajoutent les fruits qui viennent d’un peu plus loin, c’est pourquoi ils font rêver : les dattes, les figues, des abricots parfois.
La nature semble également nous donner un coup de main en nous proposant, les noix, les amandes et les noisettes…

Faisons nos achats :

La première des choses qui me semble indispensable, c’est de vous mettre en garde.
Surtout, n’achetez pas trop.

– 100 g de pommes séchées.
– 100 g de poires séchées.
– 100 g de quetsche ou pruneau.
– 100 g d’abricots secs.
– 100 g de dattes.
– 100 g de figues.
– 100 g de raisins secs.
– 100 g de cerneaux de noix.
– 100 g de noisettes.
– 100 g d’amandes.

cela fait vite beaucoup sans compter l’alcool, la farine, les épices etc…

Comment préparer les fruits ?

Il faut les découper, ce qui n’est pas toujours facile, quand ils sont bien secs.
Alors, les petits malins commencent par faire ramollir les fruits pour les réhydrater et faciliter leur découpe.
Faire gonfler comment ?

Là vous avez le choix.
Si vos Beerawecka sont destinés à des adultes, réhydratez vos fruits dans un bon coup d’alcool blanc (quetsche, mirabelles, kirsch…)

Mais si vous voulez en donner à des enfants, il est certainement préférable de réhydrater les fruits dans un sirop (eau+ sucre).
Vous pourrez toujours ajouter un peu d’alcool pour les adultes.

On peut faire mariner les fruits toute une nuit, mais n’oubliez pas le micro onde. Il fait du bon travail. 

Quand les fruits sont bien ramollis et découpés, laissez-les égoutter.  Ne jetez pas le jus. Vous pouvez toujours le boire !

Préparation de la pâte :

Là, il faut tout d’abord faire un choix.

On peut utiliser :

– de la pâte à pain.
– de la pâte à pain de seigle.
– de la pâte un peu plus fine, genre brioche.

La pâte à pain :

500 g de farine type 55.
300 g d’eau.
1/2 cube de levure de boulanger.
1p de sel.

 

Mettre les 500 g de farine dans la cuve du batteur.
Emiettez la levure dans l’eau tiède (surtout pas chaude)
Versez l’eau sur la farine.
Laissez travailler lentement 10 minutes en vitesse lente.
Ajouter le sel à la fin.

La pâte à pain de seigle :

500 g de farine de seigle.
300 g d’eau.
1/2 cube de levure de boulanger.
1p de sel.
1 c.a.s. de sucre.

Travailler comme la pâte à pain blanc en mélangeant le sucre à la farine. Le sel toujours en dernier.

 

La pâte fine style brioche :

500 g de farine type 45.
1 œuf.
1 autre œuf pour la dorure dorure.
250 g de lait tiède.
1 c.a.s. de sucre en poudre.
100 g de beurre pommade.
1 p de sel.

Versez la farine dans la cuve du batteur.
Ajouter un œuf.
Ajoutez le sucre et la pincée de sel
Diluer la levure ans le lait tiède (surtout pas chaud)

Faites tourner.
Quand la pâte est bien homogène, ajoutez le beurre pommade.

Dans tous les cas, il faut bien épicer les pains aux fruits avec cannelle, anis étoilé en poudre, grains d’ais vert, curcuma, clou de girofle, pointe de 4 épices… ou tout simplement un mélange pour pains d’épices.

Quelle que soit la pâte ; il faut la faire lever dans un endroit tiède.
Quand elle aura doublé de volume, il faut la rabattre, c’est à dire la retravailler une seconde fois.

Ensuite, on mélange les fruits et la pâte et on forme les «pains».
La levure va les faire doubler.
Les dorer avec de l’œuf.
Les décorer avec quelques amandes…
Laisser cuire à 180°C.

Vérifier la cuisson avec la lame d’un couteau.
Vérifiez la cuisson avec une aiguille à brider ou un couteau pointu.
Les pains aux fruits sont cuits quand il ne reste plus de pâte collée à la lame.

Laisser refroidir sur une grille.

Les pains aux fruits méritent qu’on leur accorde un temps de maturation. Le goût devient meilleur quand ils vieillissent (surtout à l’abri des gourmands).

Dégustation :

Les pains aux fruits se mangent sans faim pour le plaisir de sentir les saveurs et les odeurs.


Petite idée :

Découpés en tranches fines, les pains aux fruits accompagnent à merveille le foie gras.
 

Bon appétit.

En attendant mes propres photos… cliquez ICI
Regardez la diversité des formes, des couleurs, des aspects. C'est bien la preuve que chacun peut interprêter la recette à sa guise.

 

Illustration : le film de la rectte cliquez ICI


 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mulhouse : marché de Noël

En Alsace c'est la pleine saison des marchés de Noël. Il y en existe de célèbres dans toutes les grandes villes Colmar, Mulhouse, Strasbourg.
Mais chaque village essaie de promouvoir son propre marché de Noël.

A Mulhouse, le marché de Noël se tient sur la place de la Réunion ( réunion de l'Alsace et de la France).
Sortant d'hospitalisation, je n'ai pas encore pu aller voir à quoi ressemble le marché 2016 mais voici quelques photos de celui de l'année 2015.

 

PREPARER VOTRE FOIE GRAS MAISON

LE FOIE GRAS « MAISON »

 

Le foie gras est depuis un certain temps au cœur d’un certain nombre de polémiques qui soulèvent des problèmes :

– de souffrance animale.
– de diététique.
– de gastronomie.

Toujours est-il que le foie ne date pas d’hier vu que déjà les Romains s’en délectaient.
Il est, paraît-il, d’origine alsacienne, comme le prouve l’article ICI.

Force est d’admettre que le foie est un des produits phares de la gastronomie française et qu’il a rapidement conquis tout le monde.


On pourrait consacrer plusieurs livres au foie gras. Nous nous contenterons de rester pratiques. Nous concentrerons nos efforts à répondre  aux principales questions posées par la fabrication familiale.

 

La fabrication du foie gras a toujours été entourée d’un cortège de déclarations plus ou moins vraies.
Les unes prétendant que l’opération est particulièrement délicate, alors que les autres s’étonnent de sa facilité.
Je pense que, comme toujours, il convient de garder les pieds sur terre.

Le foie gras est  un produit cher à l’achat, ce qui a pour conséquence que l’on n’a pas souvent l’occasion de le travailler.
Les essais risquent donc d’être onéreux.

 

Oie ou canard ?

C’est la première question.
Je dirais que chaque catégorie a ses partisans. C’est avant tout une affaire de goût. Vous avez donc toute liberté de choix.
Personnellement, je suis d’avantage partisan du foie gras de canard qui me semble plus typé. Mais, c’est un choix tout à fait personnel.

 

Provenance :

C’est généralement la seconde question car la provenance a des incidences sur le prix et la qualité.
On trouve du :

– foie gras français.
– foie gras étranger.

En France, les grandes régions de production du foie gras sont : le Périgord, le Sud Ouest, l’Alsace,
mais il existe des petits producteurs dans pratiquement toutes les régions.

Quand on recherche les pays producteurs de foie gras à travers le monde on trouve :

– la Hongrie.
– la Bulgarie.
– Israël.

Le foie gras nécessite beaucoup de main œuvre.

Deux types d’élevage :

Les élevages industriels fournissent de grandes quantités de foie gras. Les prix sont souvent attractifs, mais ils varient en fonction de l’offre et de la demande. Ils « grimpent » en période de fête.

Les élevages du type « familial » produisent des quantités moindres, mais souvent de qualité supérieure.
Il faut cependant admettre de payer un prix plus élevé.

Généralement, les élevages se chargent de l’élevage et du gavage. Ils produisent les foies bruts qui seront transformés en foie gras en toute une gamme de produits comme :

– les foies gras entiers.
– les foies  avec morceaux.
– les foies émulsionnés.

Ces traitements sont réalisés par des industriels, mais on trouve également de plus en plus de producteurs plus petits qui proposent des foies gras prêts à la consommation.

Les médias, grâce aux émissions culinaires de plus en plus nombreuses, sont certainement responsables du fait qu’actuellement beaucoup d’amateurs osent se lancer dans la fabrication familiale du foie gras.

Cet article est écrit à leur intention.

 

ACHETER DU FOIE GRAS : COMMENT LE CHOISIR ?

Pour bien souligner l’importance capitale du choix du foie brut,  il faut faire un petit bond en avant et voir comment le foie réagit à la cuisson.
Même si vous respectez les conseils de température, de durée, etc… un foie de qualité moindre relâchera une partie de son gras.
Il existe une expression qui décrit ce phénomène : on dit que le foie gras « freinte. »
Définition : la freinte est la partie que l’on perd pendant le processus de la fabrication.
Plus un foie gras freinte, plus vous aurez de la perte, plus cher sera le résultat final et ceci même si vous ne le sentez pas à la dégustation.

Il faut donc veiller à acheter le meilleur foie gras possible.
Cela est très vite dit, mais la réalité est tout autre.
Les foies gras sont la plupart du temps vendus sous vide. Il devient très difficile, voire impossible, de distinguer la couleur et surtout la texture. On dit qu’un foie gras de bonne qualité prend l’empreinte du pouce mais que cette empreinte disparaît rapidement.
Avec un foie gras sous vide, vous pouvez toujours essayer de le marquer avec le pouce !

Il faut garder les pieds sur terre et admettre que rares sont les occasions qui vous permettent, du moins en grande surface, d’évaluer la qualité du foie gras.
Il en va autrement si vous avez la chance de pouvoir acheter le foie gras brut directement chez l’éleveur ou sur un marché.

La couleur d’un foie gras dépend avant tout de la nourriture et du gavage.
Si l’animal a été nourri avec du maïs, la couleur tirera d’avantage sur le jaune.

Pour le reste, vous êtes obligés de faire confiance et donc risquer d’être trompés.

 

PREPARATION DU FOIE GRAS.

 

Il serait facile de recopier les nombreuses recettes que l‘on trouve un peu partout et d’en faire un « mix ».
Je préfère vous livrer la recette que j’utilise actuellement.
On utilisant l’adverbe « actuellement » je tiens à souligner le fait que cette recette est d’une part issue de mes expériences passées, mais qu’elle s’enrichit de toutes les nouvelles expériences que je suis amené à faire.

Que faut-il pour faire du foie gras ?

 

LES DENREES :

– du foie gras brut.
– du lait.
– de l’assaisonnement.
– un alcool (facultatif) .
– truffes (facultatif).

LE MATERIEL :

– couteau.
– balance au gramme près ou cuiller à peser.
– thermomètre.
– terrines.
– four.
– récipients divers.

 

LES PRINCIPALES ETAPES DE LA FABRICATION DU FOIE GRAS :

 

  1. Parer – enlever les veines.
     
  2. Dégorger dans du lait.
     
  3. Assaisonner et mariner.
     
  4. Cuisson.
     
  5. Maturation.


DETAILS DES OPERATIONS

1) Parer – enlever les veines.

Les lobes du foie sont parcourus par un réseau de veines qu’il faut retirer :

– parce que les veines forment des taches de couleur peu agréables à la vue,
– parce les veines  ne sont pas agréables en bouche.

 « L’éveinage » est une opération assez délicate si bien que la plupart de temps, les foies sont vendus déjà éveinés pour une petite augmentation de prix. Je pense que l’économie réalisée est loin de compenser le travail. On a donc tout intérêt à acheter des foies déjà déveines.

Voir vidéo ICI

Pourtant, je vous recommande malgré tout, de vérifier pour voir si l’on n’a pas par hasard oublié un petit morceau de veine.
Rien de plus désagréable que d’en découvrir un lors de la découpe.

Pour vérifier, je vous recommande de ne pas utiliser la partie tranchante d’un couteau, mais plutôt le dos de la lame qui permet plus facilement de soulever une éventuelle veine.

2) Dégorger dans du lait :

Mettez votre foie éveiné dans un récipient et recouvrez le entièrement de lait. Filmer avec un film alimentaire, et conserver au froid pendant une nuit. Le lait va rendre votre foie plus blanc et plus doux.

3)  Assaisonner et mariner :

Je pense que l’assaisonnement constitue une étape très importante dès que l’on cherche à obtenir un résultat parfait.

Pour calculer les masses des différents éléments de l’assaisonnement, il faut avant tout peser le foie, donc il faut commencer par bien l’égoutter.

Eléments de l’assaisonnement.

Sel fin : 9 g/ kg de foie brut.

– le sel fait partie de l’assaisonnement classique.

Sel nitrité : 5 g/kg de foie brut.

– il va garder au foie une teinte rosée.

Sucre : 8 g/ kg de foie brut.

– outre son rôle d’édulcorant le sucre va réagir avec le sel nitrité

Poivre : 3 g/ kg de foie brut.

3 g cela représente beaucoup. Choisissez de préférence du poivre blanc moulu. Il est parfois agréable de goûter un petit morceau de poivre s’il est concassé, mais je préfère laisser entière liberté aux convives de donner un tour de moulin de poivre sur leur assiette de foie gras.

cuiller-balance

Très pratique : une cuiller qui sert de balance. 
Attention ! 2 pièges

– oublier de faire la tare à zéro
– confondre les unités gramme ou oz

4) Marinade ou pas ?

Voici une question qui revient souvent car de nombreux produits industriels comportent un alcool.
Une étiquette qui annonce foie gras au porto, foie gras au cognac cela fait bien, mais voilà, je vous propose une autre façon de voir.

Suivez-moi !

Si, au moment de la dégustation, un convive s’exclame « on sent bien le porto » c’est tout simplement que vous en avez mis trop.

Si par contre, les convives détectent un petit «  je ne sais quoi » qui vient flatter leurs papilles, c’est que vous avez trouvé le bon alcool et le bon dosage.

Je ne peux que vous encourager à éviter les alcools trop forts qui viennent tuer votre foie gras. Il faut à tout prix rester dans la subtilité et au niveau du choix de l’alcool et surtout au niveau de son dosage.

Personnellement, j’ai un petit faible pour le Pacherenc : cliquez ICI

Ou le  Muscat  Beaumes de Venise : cliquez ICI

 

Mais toujours à doses, je dirais presque homéopathiques.

Pour un foie gras  d’environ 600 g, j’utilise au maximum 3 cuillers à soupe d’alcool.
Vous voyez que nous sommes dans les doses délicates.

5) Salage

Avant de donner les conseils de salage, je suis obligé de faire un petit bond en avant et de parler de cuisson.
Il est important de bien réussir la cuisson.

Tout dépend du résultat que vous escomptez :


– foie gras pour une conservation longue de plusieurs mois.
– foie gras dit « rosé » pour une dégustation dans les 20 jours.

Comme vous le devinez, le foie gras destiné à être conservé sera cuit plus fort que celui destiné à une consommation rapide.

Un peu de physique :

Dans le four, la chaleur va pénétrer dans le foie gras de l’extérieur vers l’intérieur. A chaque instant, la température du côté extérieur sera plus forte que celle au cœur de votre foie gras.
On dit qu’il existe « un gradient » de température.

Quand le foie gras sera juste bien à l’intérieur, il risque fort d’être un peu trop cuit à l’extérieur. Là, pas moyen d’y échapper.

Sauf que….les cuisiniers ont réussi à détourner le problème. Voici comment.

Plus le foie gras est épais, plus le gradient de température sera important. Alors, il n’y a qu’à faire en sorte que le foie gras ne soit pas trop épais.
Comment ?

Il est assez facile de séparer les lobes en respectant le mieux possible leur configuration naturelle. On obtient de cette façon, des morceaux plus ou moins identiques.

Il suffit de cuire ces morceaux les uns à côté des autres jusqu’au degré désiré et de reconstituer ensuite la terrine APRES CUISSON.

Dans les terrines, les lobes vont se coller les uns aux autres pour peu que l’on facilite cette opération en posant un poids sur la terrine.

Et voilà la combine !

 

Si vous décidez de suivre ce conseil de cuisson, il faut, avant de saler le foie gras, les séparer en morceaux qui ont plus ou moins la même taille.
Mélanger bien les différents éléments de l’assaisonnement et saler vos foies. Ajouter l’alcool à la fin en le mélangeant bien.

Truffes ou pas ?

C’est encore une fois une question de goût et de prix. Les truffes ( les vraies (Tuber melanosporum) sont très chères. cliquez ICI

A vous de voir si la dépense est justifiée.
Personnellement, je pense qu’il existe d’autres moyens de mettre en valeur les propriétés organoleptiques des truffes.

Durée de salage/marinade 2 à 3 h.

Puis, on passe à la cuisson :

C’est là que le thermomètre devient l’outil indispensable.

thermometre-a-cuisson

Le thermomètre est un outil indispensable

 

thermotre-pour-cuisson

Autre sorte de thermomètre Attention aux unités C ou Farenheit  ( ne vous trompez pas)

 

QUELQUES REGLES GENERALES :

 

Qu’est ce que  la chaleur ?

La chaleur est un transfert d’énergie.

On transfert la même quantité d’énergie de 2 manières :

– en chauffant très fort pendant une courte durée.
– en chauffant peu, mais pendant plus longtemps.

Température et durée sont donc les deux facteurs qui interviennent lors d’une cuisson.

Quelle méthode choisir ?

Pour choisir, il faut comprendre et se retourner pour examiner les buts que nous voulons atteindre.

Chauffer fortement, c’est favoriser le gradient de température.
Chauffer fortement, c’est également risquer de provoquer la freinte que nous voulons éviter.
Chauffer fortement, n’est donc pas la bonne solution.

Chauffer doucement, c’est laisser le temps à la chaleur de pénétrer lentement au cœur de l’aliment.
Il semble donc que chauffer doucement soit la bonne solution.

Soyons pratiques :

Chauffer doucement : c’est utiliser des températures entre 70° C et 100 ° C.
Notre but est de transférer une quantité de chaleur telle que la température à cœur du foie gras atteigne entre 45°C et 50°C.

Au travail :

Il convient d’abord de partir du bon pied.
Cela signifie que le foie gras sorti du frigo va avoir du mal. Il faut donc le sortir bien à l’avance pour qu’il se mette à la température ambiante.

Le four, froid au départ, doit être allumé au préalable pendant 30 minutes afin que sa température se stabilise.

Si vous mettez du foie gras dans un plat froid, le plat va être obligé de chauffer lui aussi.
Il faut donc enfourner un plat vide afin qu’il prenne la température du four 70°C à 80°C

Posez votre foie gras sur le plat préalablement chauffé.

Enfournez  à température stabilisée et suivez l’évolution de la température avec un thermomètre ou une sonde thermique.

Quand la température se situe entre 45°C et 50°C la cuisson est terminée.

METTRE EN TERRINE :

Il faut  maintenant mettre le foie cuit, en terrine. N’oubliez pas de poser tout d’abord une petite bande découpée dans un sac de congélation au fond de la terrine. Elle vous permettra de démouler plus facilement.

Remplissez vos terrines et laissez-les reposer.
Surveillez du coin de l’œil. La graisse va commencer à se solidifier.

C’est à ce moment-là qu’il convient de poser une petite planchette et un poids pour presser le foie gras.

MATURATION :

Le foie gras que vous venez de cuire est certes consommable de suite mais ce serait un grand dommage car il n’acquiert toutes ses odeurs toutes ses saveurs qu’après une phase de maturation qui dure une semaine au froid. C’est pendant la maturation qu’il développement tous ses aromes.

SERVICE DU FOIE GRAS /

On compte généralement une portion de 80 g par personne.
Il est important de servir le foie gras à la bonne température.
S’il sort directement du froid, il ne pourra développer toutes ses qualités gustatives, mais c’est bien pire encore, quand il est servi trop chaud.
Comptez 5 minutes entre frigo et table

ACCOMPAGNEMENT :

Pain de mie grillé.
Pains spéciaux grillés
Brioches tièdes

 

Evitez moutarde et ketchup !

Vous riez ? Vous croyez que je me moque de vous !
Et bien non ! Un jour, un serveur est arrivé en cuisine l’air totalement outré.
Chef ! Il y a un fou en salle !
Il demande de la moutarde avec le foie gras !

Vrai de vrai !
Le client est roi.

 

Allez, bon appétit.
J’espère avoir réussi à vous démontrer que faire du foie gras est à la portée de tous ceux et de toutes celles qui réfléchissent et qui essaient de comprendre le pourquoi des choses.
Il faut tout juste être logiques et travailler avec soin.

 

Mais quel plaisir de manger le foie gras de sa propre fabrication !


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

 

 

 


 

Noël alsacien

A chacun de fêter Noël à sa façon.
Chez nous, en Alsace, Noël est certainement la fête la plus importante de toute l'année.
Il y a les marchés de Noël, les crèches dans les églises, les vendeurs de sapins et les villes qui s'habillent de lumière.
Moi, je veux vous raconter ma façon de fêter Noël, celle qui me rappelle mon enfance, celle que j'essaie de transmettre, de la même façon que j'essaie de transmettre notre dialecte qui nous confère notre identité.

 

 

Dès que l’on parle de Noël, les Alsaciens sont partagés. On a d’un côté les nostalgiques et de l’autre les modernistes.
Les « Friàher » (les autrefois) contre les « Hetta » les aujourd’hui.

Chacun défend sa paroisse, mais tout le monde tombe d’accord pour considérer que Noël, «d’Wienachta »   est la fête la plus importante du calendrier.
 

A Noël, on réunit la famille. Pour Noël, on met les petits plats dans les grands.
« Fer d’Wienachta  gunscht d’r ebbis » 
Pour Noël on se paie une folie.

Il y en a même qui « lossa der Làbi los » «  disons dans le langage actuel, ceux qui s’éclatent un bon coup, mais toujours avec la ferveur de circonstance.
Les Alsaciens ont tellement conscience de l’importance de Noël qu’ils ont réussi un tour de force unique : rendre le temps élastique.

Suivez-moi : il est impossible en théorie de ralentir ou d’accélérer le temps. D’r Guschti vous dira : 

« A Viertelstund met d’m a schehna Maïdla un à Viertelstund bim Dentiste esch immer nur fufzehm Minuta»

Un quart d’heure avec une belle fille et un quart d’heure chez le dentiste, ce ne sont en réalité que quinze minutes.

Alors vu que le temps est incompressible, il n’y a qu’à le prolonger des deux côtés.

Vers l’avant en se réjouissant ; vers l’arrière en évoquant les souvenirs : « waïsh noch » tu te rappelles !

Et c’est ainsi que Noël commence immédiatement après Saint Nicolas.

Noël : la fête de la lumière.
Tout le monde est d’accord sur ce point là ; mais Noël c’est également la fête des odeurs.
Cela commence avec l‘odeur des « Bredla » les petits biscuits que l’on prépare. Et c’est tout une histoire que ces « Bredala .»
On prépare une pâte aussi fine que possible. Certains en prélèvent une partie pour la colorer avec un bon coup de cacao. Alors, on étale la pâte « met d’m Wàlholz » avec le rouleau à pâtisserie et l’on découpe qui des étoiles, qui des lunes, des sapins aussi. Il n’y a pas de limite à la fantaisie car chaque épouse  possède son petit carnet de recettes léguées par les ancêtres.
En fabriquant ses « Bredla », c’est un coup de chapeau que l’on donne aux générations passées.

La tentation de déguster les « Bredla » est grande. On aimerait les goûter les uns après les autres, mais c’est dans une boîte en fer-blanc qu’ils vont attendre sagement.

« Sa wara besser wenn sa a betzi elter send »
Ils sont meilleurs en vieillissant un peu.

Je n’ai jamais cru cette affirmation et je me faisais un devoir de contrôler régulièrement la progression de la maturation.  Cela bien sûr jusqu’au jour où ma mère s’en apercevait.

Après l’odeur des « Bredla », voici celle du sapin : une odeur puissante car le sapin, on allait le chercher directement dans la forêt, du moins quand le village possédait un bois.

Décorer le sapin est encore tout une histoire. Je me souviens  du Henri qui fabriquait des étoiles avec la paille qu’il avait ramassée juste avant les moissons. Il avait de la patience cet homme-là et il s’arrangeait pour de jamais faire deux étoiles semblables.

eoile-de-paille

Etoile du père Henri

Fabriquer les décors de Noël était chose courante. On emballait des noix dans du papier argenté récupéré sur les tablettes de chocolat. On peignait des glands avec de la couleur dorée ; il y en a même qui suspendaient à leur sapin des jouets miniatures réalisés avec la scie à découper le contre plaqué. Mais le plus important, c’est le « Schpitz » la pointe ; celle qui trône tout en haut.

« Friaher » (naguère) on n’avait pas de boules : c’est carrément des oranges et des pommes bien rouges (les pommes de la Saint Nicolas) que l’on suspendait aux branches et pas n’importe où. Non, les boules servaient à lester les branches afin de pouvoir y fixer bien droit les bougies, de vraies bougies traditionnellement rouges.

Les partisans du « Hetta » – de modernité – vous diront que les bougies, c’est dangereux et qu’il vaut mieux mettre des guirlandes électriques. Je ne dis pas non ; il y eut certes de temps à autre un incendie, mais essayez voir de souffler une guirlande électrique !

Chez nous, les parents avaient trouvé un truc infaillible pour coucher les enfants. Un truc très simple : voilà, les gosses étaient chargés d’éteindre chaque soir les bougies. Comme récompense, ils avaient droit de déguster une friandise récupérée sur l’arbre.

Là, il faut que je vous dise que même si je suis plutôt du côté des nostalgiques, je dois admettre que l’apparition des petites bouteilles en chocolat contenant une gorgée de liqueur a certainement marqué un progrès décisif ! Depuis cette invention, on ne peut plus capitale, mon sapin porte autant de bouteilles en chocolat que de boules. Question de goût dans tous les sens du mot.

 

Chaque famille préparait donc son sapin. Et le sapin était le reflet de son propriétaire. Il y a les sapins multicolores avec une débauche de couleurs et il y a les sapins un peu plus humbles qui se contentaient de deux couleurs. Pour le mien, j’ai toujours choisi le rouge et le doré.

sapin
Le sapin dans son habit de lumière

Le sapin, c’est important. C’est comme si on ouvre la porte à un ami qui vient passer les fêtes avec vous. Mais le plus important, ce sont les cadeaux que l’on dépose au pied du sapin. Car en Alsace c’est bien à Noël que l’on offre les cadeaux aux enfants et pas pour les étrennes du jour de l’an. Encore une de ces inventions des « Franzosa » – des Français de l’intérieur.

Je ne me souviens pas de grand repas de Noël. Non chez moi, c’est à dire dans ma famille, le salon restait fermé jusqu’à 20 heures. Alors quand l’horloge avait égrainé ses huit coups, on ouvrait la porte du salon et les gosses étaient tout éblouis par les lumières. On chantait quelques chansons à l’ancienne. On chantait vraiment. On ne passait pas un quelconque disque et si d’aventure la famille comprenant un musicien, il sortait qui son accordéon qui son violon. Non pas de clairon : le clairon, cela fait trop militaire  voyons !

On chantait «  il est né le divin enfant » et l’on finissait presque immanquablement par entonner en chœur « Stille Nacht Heilige Nacht » le douce nuit sainte nuit en allemand qui prouve que même si la guerre  a laissé des marques profondes, le jour de Noël, on sait pardonner.

Après la découverte des cadeaux ponctuée d’exclamations de bonheur, maman servait un kouglof ou alors quelques « Mannala » des bonshommes en brioche. Un verre de vin chaud pour les adultes et un peu de cacao pour les enfants. Et, vers minuit, on prenait la direction de l’église pour assister à la messe que dis-je, aux trois messes de minuit. La messe se terminait en point d’orgue (si vous me permettez cette expression) quand « dr Maxi » Max, le mari de Juliette, chantait le « Minuit chrétien » du haut du balcon de l’église.

mannalas

Les "mannalas" bonshommes en brioche qui trônent dans la vitrine du boulanger depuis la Saint Nicolas.

Je me suis souvent demandé qui pouvait bien prévenir Saint Pierre, qui dit-on, est chargé de la météorologie, car je me souviens que les premiers flocons de neige prenaient un malin plaisir à tomber quand nous étions sur le chemin du retour. Et c’est fatigués mais heureux que nous allions vite nous  cacher sous nos draps, les pieds bien au chaud sur une bouillotte pendant que des fleurs de  givre s’épanouissaient sur les fenêtres.

Les festivités reprenaient le lendemain. C’est le jour où l’on recevait la famille. Alors, après l’apéritif d’usage – le Suze citron ou le guignolet kirsch – on dégustait le pot au feu ses «  saladlas », suivi d’une bouchée à la reine avec des quenelles et de ris de veau, avant d’attaquer de pied ferme la « Suppahuan » – la poule et sa garniture.

Pas de fromage à l ‘époque, car il fallait laisser de la place pour la bûche ou alors extrême luxe, la torche aux marrons ou le « nègre en chemise ».
Je me souviendrai toujours de ce nègre en chemise, savant mélange de purée de marrons cuits et épluchés deux fois, et de chocolat noir le tout moulé dans un récipient ventru.

La chemise : ce n’était que de la crème Chantilly savamment déposée à la poche à douille.

N’oubliez pas le café et le « Schnaps » les alcools blancs. A l’époque, on n’avait pas encore inventé les alcotests.

Mais ce n’est pas fini, car les Alsaciens ont le privilège de fêter le 26 décembre la Saint Etienne, jour férié qui fait bien des jaloux du côté des Français.
Alors soit on rendait visite aux membres de la famille que l’on n’avait pas encore revu … depuis la veille ou alors, on mangeait les restes. J’ai le souvenir de langue de bœuf fumée avec sa salade de pommes de terre ou alors une simple palette de porc fumée (faut savoir rester simple non ?)

 

Voilà, à l’époque Noël n’avait pas encore cette odeur d’argent, cette couleur de paillette, ces sons de CD numériques. On ne rêvait pas de caviar et de saumon fumé, et je pense que l’on était tout au moins aussi heureux que maintenant.

Mais il me plait à évoquer une histoire qui est bien incrustée dans ma mémoire. C’est l’histoire que racontait mon père.

C’est l’histoire d’un Noël de la dernière guerre quand, au-delà, des ordres de l’état major, au-delà des rancœurs et des vengeances, le soir de Noël des deux côtés de la frontière, là-bas dans les tranchées, les soldats avaient déposé leurs armes et avaient entonné un "Douce nuit Sainte Nuit" auquel avait répondu un « Stille Nacht Heilige Nacht » chanté par des soldats qui pour l’espace d ‘un instant étaient redevenus des hommes.

Le miracle de Noël diront certains.

 

Papy revient

Après une hospitalisation de 3 semaines, papy est de retour. 

Au programme :

– priorité au rodage de sa nouvelle jambe.
– mise en ligne des quelques 80 articles que papy a écrits pendant son séjour à l'hôpital.

Merci de votre fidélité

Les vraies urgences ( Noël en Alsace)

Une seconde, c’est une seconde.
Une minute, c’est une minute.
Une heure, c’est une heure.

Le temps passe comme un cœur qui bat.
C’est du moins ce que je croyais, moi aussi, jusqu’au jour où j’ai compris.

Le temps fixe, le temps régulier, le temps immuable… Laissez-moi en douter.
Il se semble que nous sommes éternellement en attente de quelque chose et que l’attente confère au temps une certaine élasticité.

Dans quelques jours, les Américains vont voter.
Cela fait des mois que la campagne électorale fait rage.
Une sacrée maladie qui se moque des frontières.
Dans quelques semaines, ce sont les français qui sont appelés aux urnes.
Et puis, c’est comme la grippe, la maladie électorale va faire le tour du monde et comme la Terre est ronde, la maladie reviendra au point de départ pour entamer un second tour…

Chacune est libre de se faire sa propre opinion, moi je dis :

 ATTENTION, IL Y A PLUS URGENT.
NOËL APPROCHE.

Permettez-moi de vous raconter Noël  en Alsace en version originale. (V.O.)
Ce serait dommage de se priver de la sonorité de nos mots en dialecte alors, j’ai décidé de leur rendre hommage en les habillant de parenthèses, traduction immédiate bien sûr.

 

 

Dès que l’on parle de Noël, les Alsaciens sont partagés. On a d’un côté les nostalgiques et de l’autre les modernistes.

Les « Friàher » (les autrefois) contre les « Hetta » les aujourd’hui.

Chacun défend sa paroisse, mais tout le monde tombe d’accord pour considérer que Noël, « d’Wienachta »   est la fête la plus importante du calendrier.
 

A Noël, on réunit la famille.
Pour Noël, on met les petits plats dans les grands.
« Fer d’Wienachta  gunscht d’r ebbis. » 
Pour Noël on se paie une folie.

Il y en a même qui « lossa der Labi los » «  disons dans le langage actuel, ceux qui s’éclatent un bon coup.
Mais toujours avec la ferveur de circonstance.
 

Les Alsaciens ont tellement conscience de l’importance de Noël qu’ils ont réussi un tour de force unique : rendre le temps élastique.

Suivez-moi : il est impossible en théorie de ralentir ou d’accélérer le temps. D’r Guschti vous dira : 

« A Viertelstund met d’m a schehna Maïdla un à Viertelstund bim Dentiste esch immer nur fufzehm Minuta»

Un quart d’heure avec une belle fille et un quart d’heure chez le dentiste, ce ne sont en réalité que quinze minutes.

 

Alors vu que le temps est incompressible, il n’y a qu’à le prolonger des deux côtés.

Vers l’avant en se réjouissant ; vers l’arrière en évoquant les souvenirs : « waïsh noch » tu te rappelles !

 

Et c’est ainsi que Noël commence immédiatement après Saint Nicolas.

Noël : la fête de la lumière.
Tout le monde est d’accord sur ce point là, mais Noël c’est également la fête des odeurs.
Cela commence avec l‘odeur des « Bredla » les petits biscuits que l’on prépare. Et c’est tout une histoire que ces « Bredala .»

On prépare une pâte aussi fine que possible.
Certains en prélèvent une partie pour la colorer avec un bon coup de cacao.
Alors on étale la pâte « met d’m Wàlholz » le rouleau à pâtisserie et l’on découpe qui des étoiles, qui des lunes, des sapins aussi.
Il n’y a pas de limite à la fantaisie. Chaque épouse  possède son petit carnet de recettes léguées par les ancêtres.
En fabriquant ses « Bredla », c’est un coup de chapeau que l’on donne aux générations passées.

 

La tentation de déguster les « Bredla » est grande.
On aimerait les goûter les uns après les autres, mais c’est dans une boîte en fer-blanc qu’ils vont attendre sagement.

« Sa wara besser wenn sa a betzi elter send »

Ils sont meilleurs en vieillissant un peu.

 

Je n’ai jamais cru cette affirmation et je me faisais un devoir de contrôler régulièrement la progression de la maturation. 
Cela bien sûr jusqu’au jour où ma mère s’en apercevait.

 

Après l’odeur des « Bredla », voici celle du sapin : une odeur puissante car le sapin, on allait le chercher directement dans la forêt, du moins quand le village possédait un bois.

Décorer le sapin est encore tout une histoire.
Je me souviens  du Henri qui fabriquait des étoiles avec la paille qu’il avait ramassée, juste avant les moissons.
Il avait de la patience cet homme-là et il s’arrangeait pour de jamais faire deux étoiles semblables.

Fabriquer les décors de Noël était chose courante.
On emballait des noix dans du papier argenté récupéré sur les tablettes de chocolat.
On peignait des glands avec de la couleur dorée ; il y en a même qui suspendaient à leur sapin des jouets miniatures réalisés avec la scie à découper le contre plaqué. Mais le plus important c’est le « Schpitz » la pointe ; celle qui trône tout en haut.

« Friaher » (naguère) on n’avait pas de boules : c’est carrément des oranges et des pommes bien rouges (les pommes de la Saint Nicolas) que l’on suspendait aux branches et pas n’importe où. Non, les boules servaient à lester les branches afin de pouvoir y fixer bien droit les bougies, de vraies bougies traditionnellement rouges.

Les partisans du « Hetta » – de modernité – vous diront que les bougies, c’est dangereux et qu’il vaut mieux mettre des guirlandes.
Je ne dis pas non ; il y eut certes de temps à autre un incendie, mais essayez voir de souffler une guirlande électrique !

Chez nous, les parents avaient trouvé un truc infaillible pour coucher les enfants.
Un truc très simple : voilà les gosses étaient chargés d’éteindre chaque soir les bougies.
Comme récompense, ils avaient droit de déguster une friandise récupérée sur l’arbre.

Là, il faut que je vous dise que même si je suis plutôt du côté des nostalgiques, je dois admettre que l’apparition des petites bouteilles en chocolat contenant une gorgée de liqueur a certainement marqué un progrès décisif ! Depuis cette invention, on ne peut plus capitale, mon sapin porte autant de bouteilles en chocolat que de boules. Question de goût dans tous les sens du mot.

Chaque famille préparait donc son sapin. Et le sapin était le reflet de son propriétaire.
Il y a les sapins multicolores avec un débauche de couleurs et il y a les sapins un peu plus humbles qui se contentaient de deux couleurs.
Pour le mien, j’ai toujours choisi le rouge et le doré.

 

Le sapin, c’est important. C’est comme si on ouvre la porte à un ami qui vient passer les fêtes avec vous. Mais le plus important ce sont les cadeaux que l’on dépose au pied du sapin. Car en Alsace, c’est bien à Noël que l’on offre les cadeaux aux enfants et pas pour les étrennes du jour de l’an.
Encore une de ces inventions des « Franzosa » – des Français de l’intérieur.

 

Je ne me souviens pas de grand repas de Noël. Non chez moi, c’est à dire dans ma famille, le salon restait fermé jusqu’à 20 heures. C'est la grosse horloge qui donnait le feu vert. Alors, on ouvrait la porte du salon et les gosses étaient tout éblouis par tant de lumières. On chantait quelques chansons à l’ancienne. On chantait vraiment. On ne passait pas un quelconque disque et si d’aventure la famille comprenant un musicien, il sortait qui son accordéon qui son violon. Non pas de clairon : le clairon, cela fait trop militaire  voyons !

On chantait «  il est né le divin enfant » et l’on finissait presque immanquablement par entonner en chœur « Stille Nacht Heilige Nacht » le douce nuit sainte nuit en allemand qui prouve que même si la guerre  a laissé des marques profondes, le jour de Noël, on sait pardonner.

 

Après la découverte des cadeaux ponctuée d’exclamations de bonheur, maman servait un kouglof ou alors quelques « Manala » des bonshommes en brioche. Un verre de vin chaud pour les adultes et un peu de cacao pour les enfants. Et, vers minuit, on prenait la direction de l’église pour assister à la messe que dis-je, aux trois messes de minuit. La messe se terminait en point d’orgue (si vous me permettez cette expression) quand « dr Maxi » Max, le mari de Juilette, chantait le Minuit chrétiens du haut du balcon.

Je me suis souvent demandé qui pouvait bien prévenir Saint Pierre, qui dit-on, est chargé de la météorologie, mais je me souviens que les premiers flocons de neige prenaient un malin plaisir à tomber sur le chemin du retour. Et c’est fatigués, mais heureux que nous allions vite nous  cacher sous nos draps, les pieds bien au chaud sur une bouillotte pendant que des fleurs de  givre s’épanouissaient sur les fenêtres.

 

Les festivités reprenaient le lendemain. C’est le jour où l’on recevait la famille.
Alors après l’apéritif d’usage – le Suze citron ou le guignolet kirsch, on dégustait le pot au feu ses «  saladlas », suivi d’une bouchée à la reine avec des quenelles et de ris de veau, avant d’attaquer de pied ferme la « Suppahuan » – la poule et sa garniture.

Pas de fromage à l ‘époque car il fallait laisser de la place pour la bûche ou alors extrême luxe, la torche aux marrons ou le « nègre en chemise ».
Je me souviendrai toujours de ce nègre en chemise, savant mélange de purée de marrons cuits et épluchés deux fois, et de chocolat noir le tout moule dans un récipient ventru.

La chemise : ce n’était que de la crème Chantilly savamment déposée à la poche à douille.

N’oubliez pas le café et le « Schnaps » à les alcools blancs. A l’époque, on n’avait pas encore inventé les alcotests.

 

Mais ce n’est pas fini, car les Alsaciens ont le privilège de fêter le 26 décembre la Saint Etienne, jour férié qui fait bien des jaloux du côté de Français.
Alors soit en allait en visite chez les membres de la famille que l’on n’avait pas encore revu … depuis la veille ou alors, on mangeait les restes. J’ai le souvenir de langue de bœuf fumée avec sa salade de pommes de terre ou alors une simple palette de porc fumée (faut savoir rester simple non ?)

 

Voilà, à l’époque Noël n’avait pas encore cette odeur d’argent, cette couleur de paillette, ces sons de CD numériques. On ne rêvait pas de caviar et de saumon fumé, et je pense que l’on était tout au moins aussi heureux que maintenant.

 

Mais il me plait à évoquer une histoire qui est bien incrustée dans ma mémoire. C’est l’histoire que racontait mon père.

C’est l’histoire d’un Noël de la dernière guerre quand, au-delà, des ordres de l’état major, au-delà des rancœurs et des vengeances, le soir de Noël des deux côtés de la frontière, là-bas dans les tranchées, les soldats avaient déposé leurs armes et avaient entonné un Douce nuit Sainte Nuit auquel avait répondu un « Stiele Nacht Heilige Nacht » chanté par des soldats qui pour l’espace d ‘un instant étaient redevenus des hommes.

Le miracle de Noël diront certains.

 

 

 

mannalas

Ce sont les mannala qui annoncent l'arrivée de Noël. Chaque année, ils apparaissent un peu plus tôt dans les vitrines des pâtissiers

 

arrangement-noel

On a ramassé les éléments qui permettront de réaliser des arrangements de Noël

 

eoile-de-paille

Henri a fabriqué ses étoiles de paille

 

sapin

En rêve déjà du sapin que l'on installera dans le salon

 

 

LES SALADES : Généralités

INTRODUCTION

Le mot « salade » possède comme beaucoup d’autres mots, plusieurs significations.
Au sens propre, il désigne à la fois un ensemble de plantes  ainsi que des préparations culinaires.
Mais le mot « salade »  sous entend aussi une notion de « mélange » sans ordre apparent, si bien que le mot a également un sens figuré : une sacrée salade !

LES SALADES DES CUISINIERS.

Salades : sens culinaires.

Chaque mot possède des références visuelles et, quand on parle de salade, on évoque souvent l’image d’un saladier contenant de la laitue.
Par associations d’idées, le mot « salade » désigne donc des légumes servis avec une sauce dont la plus célèbre est la sauce vinaigrette.

Les salades de carottes, de radis, de concombre etc… constituent une famille de préparations culinaires regroupées sous le terme de « crudités ».

Il existe cependant un terme qui n’a été forgé que récemment : les « cuidités ».
La consonnance entre les deux mots crudités et cuidités est évidente.
Rien de bien nouveau, sauf le mot en lui-même.
Il y a bien longtemps que certaines personnes éprouvent des difficultés à manger des crudités (problèmes de dentition).
On a donc adapté la texture de certains légumes en leur faisant subir une cuisson totale ou partielle, afin de faciliter la mastication. (Exemple : carotte). Le cuisinier peut donc moduler la  fermeté en jouant sur la durée de la cuisson.
On  utilise également d’autres techniques.
Prenons l’exemple de la préparation d’une salade de chou rouge cru.
Pour attendrir les feuilles, on utilise quelques petits «  trucs » simples.

– on les taille en julienne très fine.
– on soumet cette julienne à l’action du sel.
– on ajoute également du vinaigre (cuisson par acidité) pour renforcer l’action du sel tout en  rehaussant la couleur.
Cette technique de préparation peut durer plus ou moins longtemps : quelques heures voire quelques jours.

Une fois attendrie, la julienne est rincée pour éliminer l’excès de sel avant d’être servie avec une sauce appropriée.

Crudités et  cuidités  jouent un rôle important dans notre alimentation. Apport de vitamines, forte teneur en eau, acidité, fonction apéritive,  rôle de ballaste alimentaire, apport en fibres …

Autres salades :

Pour rester dans les légumes, signalons la salade de pommes de terre – aussi désignée par l’expression : « pommes de terre à l’huile et au vinaigre. »
La salade de pommes de terre varie beaucoup d’une région à l’autre. Plus on va vers les pays de l’Est, plus on trouve des variétés de salades de pommes de terre : choix de sauces différentes, ajout d’autres éléments (cornichons, betteraves rouges…)

Le mot salade  ou l’expression «  en salade » désigne aussi un mode de préparation et/ou un mode de présentation.

Notons pour simple mémoire :

– les salades de riz.
– les salades de pâtes.
– les salades de viandes.
– les salades de charcuteries.
– les salades de produits de la famille des poissons, crustacé
– sans oublier la simple salade de fruits crus ou cuits.

Premières conclusions :

Il ne faut pas négliger les rôles des salades dans l’alimentation générale et la préparation des menus en particulier.

Signalons que dans certains pays, il est de coutume de commencer le repas par des salades, dans d’autres, les repas se terminent par la salade.
Notons également que sauf exagération, les salades à base de légumes sont peu caloriques (ne mettez donc pas une tonne de cerneaux de noix ect…). Elles permettent donc de « remplir» une partie de l’estomac qui ne pourra plus accueillir des aliments plus caloriques d’où l’importance des salades dans certains régimes.
Autre point important : la teneur en eau.
Salades et potages possèdent des rôles similaires : ils apportent une grande quantité d’eau.

 

LES SALADES DES JARDINIERS.

Cuisiniers et jardiniers sont indubitablement liés par les lois de l’offre et de la demande.
Pourquoi produire des salades, s’il n’y avait pas de demandes ? Comment les cuisiniers pourraient-ils varier leurs réalisations, s’il n’y avait pas  de nombreuses offres ?
Les mariages de raison sont souvent les plus durables.

La demande :

Elle est importante à 2 points de vue : quantitative et qualitative.

Quantitative :

L’augmentation de la consommation de salades est un phénomène relativement récent. Il est vrai que la valeur nutritive des salades n’a pas laissé de traces qu’une quelconque bataille pour la salade !
Les salades ne correspondent pas aux besoins fondamentaux de la nutrition humaine. On peut donc considérer que l’importance accordée à la «  salade » est d’apparition récente.

N’empêche que l’évolution est là. Après avoir essayé de régler les problèmes en approvisionnement des produits fondamentaux, l’Homme mangeur par obligation est devenu mangeur par plaisir.
La peur de mourir par manque a fait place à la peur de mourir trop jeune par excès !
L’Homme a pris conscience du problème de sa survie face à toutes les tentations qui le guettent.

Qualitativement :

Je dirais, un sourire aux lèvres :

On ne va quand même pas manger tous les jours des frites !

C’est juste pour vous faire sourire. Celui qui a faim, n’a pas le souci de manger quotidiennement la même chose. Il mange. Il ne dit rien, car on ne parle pas la bouche pleine.
L’humoriste Jean-Marie Bigard parle dans l’un de ses sketchs, de la hantise du manque d’appétit qui est selon lui, à la base de notre besoin de nous souhaitez «  bon appétit ».

Il semblerait donc que la salade soit un de ces aliments qui agrémentent l’acte nutritionnel. On a bien sûr cherché à étayer ce fait pas des raisons éminemment scientifiques.

Toujours est-il que l’on mange de plus en plus de salades ce qui entraine des conséquences logiques :

– il faut produire de la salade dans toutes les saisons.
– il faut essayer de varier les goûts, les couleurs, les formes, tout ce que l’on désigne aussi par les qualités organoleptiques.

 

Produites en plein air, en serre froide, on serre chaude, forcées dans des souterrains ou des caves, les salades sont présentes tout le long de l’année. On s’achemine même vers de nouvelles techniques à savoir la production de salades dans des « usines » dans lesquels des ordinateurs contrôlent tous les paramètres de production de salade sur des tissus arrosés de solutions  nutritives.

 

Nb : à quand l’apparition de la nostalgie de la salade de pissenlit sauvage ?

L’offre est devenue très vaste :

Le printemps offre d’une part, des laitues qui ont été plantées avant l’hiver et qui en profitent pour se présenter dès les premiers beaux jours.
Viennent ensuite les mois de mai et de juin avec les laitues, les fameuses reines de mai, etc…

L’été pose quelques problèmes de résistance à la montée en graines et de résistance à la chaleur et au manque d’eau.

L’automne apporte son cortège de salades de la famille des endives scaroles…de mâches.

L’hiver est consacré au forçage de certaines espèces Witloof, barbe de capucin, rouge de Vérone…

J’aimerais évoquer en quelques mots quelques espèces possédant des particularités  comme la chicorée pain de sucre.
J’ai appris à la connaître parce qu’elle est traditionnellement cultivée en Alsace où les températures hivernales passent souvent loin en dessous du zéro.
Mon père cueillait dans le jardin, des salades gelées, dures comme des briques.
Nous les faisions dégeler dans de l’eau froide avant de les tailler en lanières.
La salade retrouvait sa jeunesse et son goût.

Pour mémoire :

Ne pas oublier qu’un certains nombre de salades se mangent également cuites : exemples laitue braisée 

 

Illustrations photographiques provisoires © papy Jipé

Clicquer pour faire défiler

 

 

 

 

 


 

 


 

Déclinons : un nouveau genre : le déclinatif

Je décline, tu déclines…nous déclinons.

La culture est, paraît-il, ce qui reste quand on a tout oublié.

J’ai dû oublier pas mal de choses déjà.
Il me semble avec quelques années de recul, que la soi-disante culture générale comporte tout un arsenal, j’allais dire un fatras, de choses qui encombrent la mémoire et qui ne servent en définitive qu’à entretenir une illusion.

Les Français cultivés ! On m’en reparlera.

Tenez, un exemple : les logarithmes népériens, ça vous dit quelque chose les logarithmes népériens ?
Et pourtant, on nous a nourris de logarithmes népériens, on nous a gavés de logarithmes népériens.
Et bien la seule chose dont je me rappelle, c’est que les logarithmes népériens ça ne se mangent pas, et que les logarithmes népériens ça ne nourrit pas son homme exception faite des professeurs de mathématique, et encore !

Idem pour les déclinaisons.
C’était la bête noire les déclinaisons.
Nominatif, génitif, accusatif, datif… J’en passe et des meilleurs.

Le nominatif, passe encore. Il faut bien nommer les choses dont on veut parler.

Le génitif, ça sent mauvais ; on ne se méfie pas assez du génitif surtout depuis que l’on cultive des OGM.
Pas claire, cette histoire de génitif !

L’accusatif, oui, je reconnais que c’est encore à la mode surtout du côté des commissariats de police et des tribunaux. L’accusatif, ça peut servir et l’on s’en sert beaucoup.

Quant au datif, nous le laisserons aux fabricants d’agendas électroniques et autres calendriers.

 

N’empêche que la déclinaison revient en force. J’ai vu récemment que le constructeur Renault déclinait sa gamme en berline, commerciale, monospace, cabriolet.
Lors du dernier salon de la lingerie de nombreuses marques déclinaient leurs fabrications en soutien-gorge, bustier, push-up, culotte, slip ou string.

Les déclinaisons sont revenues en force. Elles sont  au goût du jour. Comme d’ailleurs les mots en « tif ».

On a toujours pris l’apéritif et au besoin on passait à la pharmacie pour acheter un laxatif plus rarement un carminatif.
Pour la Saint Valentin, on se fendait d’un pendentif. Mais voici que les préservatifs se veulent sensitifs, voilà que la politique prend un caractère de plus en plus vomitif, et que les programmes de la télévision qui se veulent de plus en plus, comment dire attractifs, deviennent, disons le mot : chiatifs !

 

Que voulez-vous il faut savoir évoluer avec son temps.
Ne voici pas que mon coiffeur, qui n’est pas un homme à couper les cheveux en quatre, a changé d’enseigne. Désormais il s’appelle « créatifs » sa femme qui tient aussi salon s’étant réservée l’appellation « positifs »

 

Les Tifs sont partout. Une histoire à vous faire dresser les cheveux sur la tête.
Il n’y a que deux échappatoires.

On peut toujours adopter une coupe à la Fabien Bartès.

Mais on peut aussi, et je ne m’en prive pas,

décliner l’offre de la modernité.

Mes frères restons attentifs !

 

 

Le Monsieur et la laisse

Il existe des gens que l’on connaît sans les connaître vraiment.

On se dit « bonjour ou bonsoir », on parle du temps, rarement de politique. On parle de la progression des saisons, puis on se quitte sur un «  à demain ». ou sur « une bonne journée »…

Mais on ne sait même pas le nom de son interlocuteur.
On se doute qu’il habite vaguement le quartier. On se rencontre chaque jour, à peu près à la même heure, sur le même itinéraire…..

Je veux vous parler du Monsieur avec le Labrador blanc. Un chien costaud, bien plus gros que le mien et comme ce sont deux mâles, nous nous saluons, chacun bien en sécurité sur son trottoir pour éviter une éventuelle bagarre, car le Labrador du Monsieur tout comme le mien, se disent bonjour avec une sorte de grognement qui ne laisse présager rien de bon.

J’ai fait la connaissance du Monsieur le jour où j’ai mis la première fois une laisse à mon chien.
Il n’a pas aimé du tout être attaché à une laisse, alors il faisait des bonds de cabri, aboyait d’une petite voix plaintive et se tordait dans tous les sens pour essayer de se débarrasser de son maudit collier.

Puis, les choses rentrèrent dans l’ordre. On finit toujours par s’habituer surtout le jour où il comprit qu’au retour de la promenade vidange, je lui présentais sa gamelle avec des croquettes, un peu de viande fraîche ou alors, délice des délices, un peu de pâté tiré d’une boîte.
Je n’ai jamais compris pourquoi mon chien adore tellement la nourriture des boîtes et je soupçonne que les fabricants ont dû chercher à se renseigner sur les goûts et les odeurs qui flattent le nez et le palais de la gente canine.

Voilà, on dit : réglé comme du papier à musique…

Nous nous rencontrons. chaque jour, à la même heure, presque au même endroit.

Alors la discussion s’engage :

– Ça va ?
– Ça pourrait aller mieux.
– Vous avez vu ce temps ?
– 
Je préfèrerais un bon coup de froid à cette grisaille qui n’en finit pas. 

Rien que des choses importantes, essentielles, vitales car on n’a rien à se dire et pourtant, au fil des années, je ne raterais pour rien ce rendez-vous quotidien et, si par aventure, l’un de nous est retenu par des obligations, l’autre sent comme un manque.

– Vous étiez malade hier ?
– Non, j’étais chez le vétérinaire…..

Et cette relation, de visu, durait depuis des années.
Elle nous mettait en quelque sorte hors du temps. le temps semblait glisser sur nous. Oh, bien sûr, il y avait bien un cheveux  gris ici et là, un de nos compagnons qui boitait d’une patte, mais il y se dégage de ce genre de relation comme un sentiment de sécurité, d’immuabilité.
Je n’ose pas dire d’éternité.

Et pourtant, l’autre jour, j’ai rencontré le Monsieur sans son chien.
En regardant bien, j’ai vu qu’il tenait une laisse à la main. Je pensais que le chien gambadait dans le parc, et comme je me rapprochais, je vis que le Monsieur avait des larmes plein les yeux.

Il me confia qu’il venait de conduire son chien chez le vétérinaire… pour la dernière fois.
Je ne sus que répondre car des larmes se mirent à couler sur mes joues.

Et maintenant, depuis quelques jours déjà, nous continuons  à nous rencontrer, à la même heure, mais sur le même trottoir. Le Monsieur m’a demandé s’il pouvait caresser mon chien…

L’autre jour, j’ai vu qu’il continuait à se promener sa laisse dans la main.
Nos regards se sont croisés.
Personne n’a dit le moindre mot.

Les vraies douleurs sont vraiment muettes.

Papy aux multiples talents