SOUPE A L’AIL DES OURS

Quelques réflexions prélimaires:

Au fur et à mesure qu’il avance en âge, un homme est confronté à diverses situations. Ce sont elles qui forgent ce que l’on appelle l’expérience.
Il existe des gens qui passent sous la pluie sans se mouiller.
Il existe des gens qui tirent des leçons des expériences bonnes ou mauvaises et d’autres qui n’en profiteront jamais.
Simples constatations !

Vouloir transmettre son expérience est un rêve d’adulte qui a pris connaissance des réalités de la vie, du temps qui passe. Un rêve oui, motivé par le souci de vouloir faire gagner du temps.
Si j’ai utilisé par deux fois le mot «rêve», c’est tout simplement que la vie m’a appris qu’à force de vouloir faire économiser du temps aux autres, on finit par perdre le sien.

«Le vieux raconte toujours la même chose. Il radote à longueur de journée.»

Je suis persuadé que ce n’est pas la bonne attitude à adopter et plus le temps passe, plus je me rends compte que de nombreuses personnes partagent mes réflexions. Il est prouvé que chaque jeune doit impérativement faire ses propres expériences. Ce n’est qu’au moment où l’on se sera brûlé que l’on peut se rendre compte de la puissance, donc du danger d’une simple allumette.

« C’est le métier qui rentre »: une phrase qu’entendent souvent les apprentis quand ils viennent de faire une erreur qui leur fait mal. Alors qu’il suffisait de rester humbles et de profiter de l’expérience des Anciens.

Les gestes ne sont pas dus au hasard, mais de la confrontation avec la matière. Mais ce qui est vrai pour les gestes l’est également pour ce que j’appelle : «la philosophie de vie.»
« La tête bien pleine et la tête bien faite » de Montaigne, ont fait place à de nouvelles expressions :
– les savoir-faire.
– les savoir-être.

Je suis enseignant jusqu’au fond du « trognon ». Je n’ai jamais appris pour savoir, mais pour le bonheur de partager en transmettant à l’Autre. Et maintenant, à l’âge de la retraite, il m’arrive de penser que j’ai passé une bonne partie de ma vie à apprendre à mes jeunes à gagner leur vie, mais que je n’ai peut-être pas passé assez de temps à leur apprendre à vivre.

C’est l’âge : à n’en point douter.
Je deviens vieux, mais c’est, parait-il, la seule façon de durer.

Le sermon est terminé.
Amen !

Après ces constatations philosophiques, revenons vite dans notre cuisine. Aujourd’hui, j’ai envie de vous parler d’une chose qui me semble « normale » : profiter de ce que nous offre la nature.
En ces périodes de crises multiples, il y a des gens qui mourraient de faim à côté d’un sac de farine !

Eh bien non ! Il suffit de savoir rester simple et de ne pas dédaigner les connaissances de nos Anciens.

Venez : je vous propose une assiette de souple, à l’ail des ours.

L’ail des ours, il suffit de se baisser pour le ramasser en grande quantité et gratuitement. Hier, j’ai bien ri en voyant une grande surface qui proposait de l’ail des ours à 1,99 € les 100 g. J’ai certainement dû zapper un truc, car, à ce prix-là, et avec tout l’ail des ours que j’ai récolté, je devrais être coté à la bourse !

AU TRAVAIL !

La réalisation de toutes les soupes suit le même processus :

  1. – faire suer une garniture dite aromatique :
    – blanc de poireau pour une soupe claire – vert de poireau, pour une soupe de couleur sombre

       – oignons : si vous n’avez pas de poireaux.

Le tout est de suer dans de la matière grasse (beurre ou huile) sans donner de couleur, car la couleur provient d’une caramélisation et comme tout le monde le sait ; le caramel donne aussi un goût pas toujours recherché.

2.

– on ajoute les feuilles d’ail des ours selon la puissance que l’on veut obtenir.

3.

– on ajoute l’élément qui va lier la soupe : ici des pommes de terre.

4.

– on mouille : selon le cas

– avec de l’eau
– avec un reste de pot-au-feu
– de l’eau avec un cube de bouillon de volaille ou de bœuf

5.

– cuisson
– puis on mixe
– on passe au chinois

6.
– finition sans rien.
– finition avec de la crème : le potage s’appellera crème d’ail des ours
_ on finit avec jaunes, d’œuf, et de la crème : le potage prend le nom de velouté d’ail des ours.

7.

 Service avec croutons servis à part

COMMENTAIRES DU CHEF :

Cette recette est vraiment facile à réaliser.
Elle a l’avantage de posséder un « côté universel », car elle s’applique à tous les potages classés dans la famille des « soupes ».

Allez : régalez-vous !

Ail des ours : on le trouve de mars à mai. Il sent fort l’ail et ne peut être confondu avec le muguet non comestible.

Emincez le poireau. Le faire suer sans coloration.

Hachez l’ail des ours après avoir enlevé les tiges. Et hop ! dans la marmite.Pommes de terre pour la liaison : mouillez selon votre goûtMixez, passez au chinois, finition à volonté crème ou velouté.

Les illustrations photographiques sont soumises à ©   Dr Christiane Ameur et Jean-Paul Brobeck alias Papy Jipé.

 

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