Anecdote : la cocotte de deuxième année

Aujourd’hui je vous propose une anecdote dont je ne suis pas l’acteur.
Elle m’a été rapportée par une personne très proche de moi.
et je l’ai transcrite de mémoire.
Ce qui compte après tout, ce n’est pas tellement la précision des faits, mais les traces qui restent gravées dans nos cœurs.

La cocotte de 2°année

“J ai toujours fait plus jeune que mon âge.”
Qui sait, c’est peut-être à cause de ma natte ?
Une natte «  à l’ancienne » qui me descendait jusqu’au milieu de mon dos.
Qui sait, peut être aussi que ma santé fragile contribuait à garder mon aspect enfantin.
A l’époque j’étais souvent fâchée.

Il paraît que je ne fais toujours pas mon âge, mais maintenant, cela ne me déplait plus du tout…

Un jour, je me retrouvais à l’hôpital pour une histoire d’otite si je me souviens bien.

J’étais en train de faire ma toilette quand la porte de ma chambre s’ouvrit sans la moindre précaution.”

C’était l’abée, l’aumônier de service qui faisait le tour de ses ouailles.

Stoppé net dans son geste, surpris, interloqué, l’abée essaya de garder bonne contenance.
Certainement encouragé par ma jeunesse, il me lança :

– Bonjour ma cocotte !
Tu dois être la nouvelle. Je ne t’ai pas encore vue.
– Plait-il, Monsieur !
– Oui, je suis passé hier, mais tu n’étais pas encore arrivée.De quel quartier viens-tu ?

– Mes parents habitent la rue qui donne sur le cimetière.

– Alors tu dois aller à l’école Jeanne d’Arc ?
– Non !
– A l’école Sainte Claire alors ?
– Non !
– Tu es trop jeune pour aller au lycée. En quelle année es-tu ?
– En seconde.
– En seconde ! C’est bien, tu es en avances. Mais en seconde de quel lycée ?
– Pas du lycée, je suis en seconde année de la faculté de médecine !”

A ces mots, l’abbé reçut comme un électrochoc.
Son visage rosit et il bégailla un

“- Excusez-moi docteur” avant de disparaître comme un dératé dans le couloir.

A l’époque, j’étais très fâchée.
Se permettre de telles familiarités était insupportable.

Maintenant, quand je repense à l’incident, je souris,

Moi la « cocotte de seconde année ».

Pardon : je voulais dire docteur

Le docteur en question a suspendu sa plaque de cardiologie à l’âge de 26 ans et cela fait bientôt cinquante ans que nous partageons nos joies et peines.

 

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