L’épicier de mon quartier

L’épicier.

 

Quand je pousse la porte, ce sont les odeurs qui m’accueillent. Là, devant moi, des abricots aux joues rouges comme des petites filles. Ici, des pêches qui semblent s’être faites belles, tout exprès. Plus loin, le fumet des salaisons suspendues à des ficelles.

Eh oui ! Aujourd’hui, je vous invite à faire un tour chez l’épicier.
Alors prenez vite votre panier. Allons-y.

L’épicier de mon village a fermé boutique depuis bien longtemps déjà.
Maintenant, les gens s’en vont, une fois par semaine, à la ville. Ils reviennent les paniers chargés jusqu’au bord. Ils font les courses. Ils sont pressés. Ils ne prennent plus le temps de regarder, de sentir avant de choisir.

Quand j’étais gosse, c’est avec joie et orgueil que je poussais la porte du magasin du père André. Maman me disait : “va me chercher des pommes et rapporte-moi en de belles !”

Alors, fier de l’importance de ma mission, je courrais chez l’épicier.

Une porte qui s’ouvre, un carillon qui résonne : me voilà dans mes souvenirs.

Jouant à cache-cache derrière les grands verres remplis de bonbons, et de friandises, l’épicier indifférent aux saisons, m’accueillait avec le sourire. Levé à quatre heures, il était allé aux halles pour être le premier. Il avait discuté âprement avec les grossistes, choisissant les légumes les plus frais, les fruits les plus parfumés, marchandant chaque prix, car c’était un peu nous tous qu’il avait l’impression de défendre.
 Quand il revenait, je prenais le chemin de l’école et nous nous disputions entre gosses, pour lui donner un coup de main quand il déchargeait sa vielle camionnette. Car il y avait toujours un fruit un peu bosselé pour celui qui saisissait  l’anse d’un panier un peu trop lourd.

Dans son magasin, André faisait régner un ordre de pharmacien. Chaque chose avait une place bien à elle et je, me souviens d’une mystérieuse lampe dont il se servait pour contrôler, un à un, les œufs avant de le poser dans un grand cornet.
Il y avait aussi deux gros pots en porcelaine blanche avec un petit robinet d’où s’écoulait la moutarde ou le condiment. Près de la porte, se dressait une grande machine étincelante. Le monstre servait une fois par semaine, pour torréfier le café. Ce jour-là, tout le voisinage se promenait les narines ouvertes, humant la bonne odeur du café et les ménagères s’empressaient de faire provisions de grains noirs qu’elles enfermaient dans des récipients aux couvercles hermétiques, comme pour mieux retenir les odeurs vagabondes.

André vendait de tout et il suffisait de faire un tour chez lui, pour avoir des idées de menus pour toute la semaine.

En automne, arrivait un grand baril de harengs salés et voilà tout le village parti pour une cure de poissons.
Au printemps, c’étaient les premières asperges, les premières laitues, les pommes de terre nouvelles.
Puis venait le temps des tomates, des myrtilles et ainsi, André régnait en maître sur nos estomacs.

Le diable d’homme avait acquis au cours des années, une telle maîtrise pour vendre ses marchandises, que, décidé d’acheter des prunes, vous reveniez avec des mirabelles dont il avait su si bien vanter la douceur.

Oui, André fait partie des souvenirs de mon enfance.
Je l’ai vu, les yeux au ras du comptoir.
Je lui ai apporté mes petites économies en échange de ses grands cornets surprise.
Un jour, il m’appela “jeune homme” et je découvris, ce jour-là, qu’André avait des cheveux blancs.

Un matin, les lourds rideaux de fer restèrent baissés. On parlait depuis bien longtemps déjà de ce grand magasin où les clients pouvaient  se servir eux-mêmes.

Le monde était devenu trop étroit pour les petits épiciers.

Après la mort d’André, on vendit sa maison. Le nouveau propriétaire fit faire de grandes transformations.
Les vitrines furent remplacées par des fenêtres et la porte fut condamnée.

Derrière elle, au fond de ma mémoire, se cachent les bruits, les couleurs et les odeurs de ma jeunesse.

André, étais-tu heureux ?
Le soir, tu faisais tes comptes comme tous les épiciers, mais, as-tu jamais compté tout l’amour que tu nous as donné ?

 

 

Les champignons : famille des bolets

Les champignons : les bolets.
 

Pour continuer la présentation des champignons, en voici un, bien connu lui aussi : le cèpe ou bolet. Nous allons partir de l’étude d’une espèce pour étendre ensuite à toute la famille.
Cèpe est le nom d’une espèce.
Bolet est le nom de toute la famille.
 

Faisons connaissance :

Une fois n’est pas coutume. Pour rencontrer le bolet, je vous emmène au super marché. Venez, suivre-moi.
Nous allons nous promener dans le rayon des potages déshydratés : vous savez, les potages en paquets.
J’ai bien dit : nous promener.
Je n’ai pas dit acheter.
Que cela soit bien clair.

Le rayon est bien achalandé : potages aux asperges, aux légumes, aux pois cassés tec… et voici le potage aux champignons.
Sur l’emballage, voici notre cèpe ou bolet.

C’est un champignon sympathique. Sa silhouette un peu enveloppée lui confère un air débonnaire, comme un papy gentil.
S’il était un animal, il serait éléphant sans nul doute.
Champignon rassurant avec ses formes rondes, tout en douceur.

Dans la réalité, il faut soit aller en forêt, soit au marché pour rencontrer notre cèpe.
Il possède un pied bien large, bien ventru.
Son chapeau rond quand il est jeune, s’épanouit quand il devient adulte. 

Sous le chapeau, pas de lamelles, mais de petits trous.( comme une éponge.)
Ces trous sont les extrémités de tubes qui jouent les tuyaux d’orgue, accolés les uns aux autres. Dans chaque tuyau, on trouve des spores minuscules.
Les spores tombent sur le sol quand les petits trous s’ouvrent.
Les tubes qui contiennent les spores sont d’abord couleur crème, puis ils deviennent jaunes puis tournent au vert.
On peut les manger, quand ils sont jeunes, mais une fois verts, il vaut mieux les enlever à cause de leur consistance spongieuse.
Tous les cèpes ne possèdent pas la même couleur de chapeau.
Il en existe des bruns clairs jusqu’à des bruns marron foncé.
On parle alors du fameux bolet tête de nègre.

Nous retiendrons :

– les bolets n’ont pas de lamelles.
– les bolets possèdent des tubes sous leur chapeau.
– les bolets peuvent devenir très grands.
– la couleur des chapeaux varie.
– chaque fois que l’on trouve un champignon qui possède des tubes, nous avons un exemplaire de la famille des bolets.

Mais attention :

Il existe aussi des variations dont nous reparlerons un peu plus tard.
Regardez plus attentivement le haut du  pied. On dirait un réseau de veines.

Que faut-il penser des bolets ?

Ce sont des champignons comestibles qui sont savoureux, et, comme les hommes ne sont pas les seuls à aimer ce qui est bon, les bolets sont également dévorés par les limaces et autres bestioles.
Il est rare de trouver un bolet vraiment intact ou alors, c’est qu’il est très jeune et née de la dernière pluie
(au sens propre comme au sens figuré).
Les bolets sont malheureusement très vite véreux.

Soyez sympathiques. Je vous ai dit que les spores sont dans les tubes. Poser le chapeau sur le sol, tubes vers le bas. Vous donnerez ainsi une chance aux spores de pouvoir redonner la vie. Merci

Utilisation des bolets :

Le mieux est bien sûr de les utiliser rapidement à l’état frais.
On les nettoie, comme on nettoie tous les champignons, sans douche, sans shampoing et sans piscine…
On les taille en tranches que l’on fait cuire dans un peu de matière grasse, beurre ou huile (olive) en salant juste un peu. L’eau va sortir des champignons et s’évaporer. Les bolets finiront par prendre une toute petite couleur et une bonne odeur.

On trouve des bolets surgelés et des bolets déshydratés.
Les bolets surgelés seront cuits décongelés ou pas, mais très lentement comme on fait pour des bolets frais.
Les bolets déshydratés doivent d’abord être ressuscités.
On les trempe dans l’eau, pour qu’ils se réhydratent. Il vaut mieux changer l’eau, parce qu’elle se charge parfois en sable. Mais, ne la jetez pas. Filtrez-là, car elle vous servira lors de la fabrication des sauces à laquelle elle apportera un bon goût de champignons.

 

Illustrations photographique : © Papy Jipé

 

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Un jeune bolet : chapeau clair encore fermé

 

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Sous le chapeau, pas de lamelles mais comme une éponge.

 

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En coupe, on voit que la masse spongieuse est formée de tubes collés les uns aux autres.
Ces tubes contiennent les spores.

 

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Gros plans sur les tubes.

 

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Boletus édulis :  souvent véreux hélas !

 

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Il y a de quoi manger.

 

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Exemplaire encore jeune. Les tubes sont encore blancs et bien serrés.

 

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On dirait un réseau veineux au haut du pied. Mais ce n'est qu'une apparence.

 

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Et si vous rentrés bredouilles…
Faites comme tout le monde
Passez au marché !