Mon beau-père était jardinier – paysagiste. Il avait été engagé par les Mines de Potasse d’Alsace pour créer et entretenir les jardins des patrons et des ingénieurs.
Il avait fréquenté les écoles alsaciennes à l’époque où l’on enseignait le français en première langue étrangère. Cela ne l’empêcha pas de posséder de solides connaissances.
Nous avions des passions communes : la botanique et tout particulièrement la mycologie.
Alors, quand l’automne allumait ses grands jeux de joie, nous allions dans la forêt, chacun de son côté pour ne pas dévoiler ses bons petits coins.
Nous nous fixions rendez-vous auprès la voiture et quand nous revenions le panier lourd, nous comparions nos cueillettes et c’est là, que les choses commençaient à se gâter.
Pour une simple question de vocabulaire vous dis-je !
Alors le « Pfifferling » devenait chanterelle ou girolle.
Le bolet hésitait entre cèpe et tête-de-nègre.
Un jour, pour sortir de l’impasse, nous avons décidé de recourir à l’Espéranto des botanistes : le latin
À partir de ce jour-là, le latin servit de trait d’union et les chanterelles, ex-girolles, ex Pfifferling s’appelèrent enfin Cantharellus Cibarius ; le bolet que nous rapportions fut anobli et reçu le nom de Boletus Edulis.
Mais je ne vous dis pas la tête des passants quand par inadvertance, ils entendaient deux énergumènes venus de je ne sais quelle planète s’entretenir dans la langue des Romains
De quoi y perdre son latin. Non ?
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