“Berawecka de Noël

Le "Berawecka" gateau tradition alsacien.

Présentation :

Noël est certainement la fête la plus importante de l’année dans les pays de l’Est, et l’Est commence dès que l’on franchit la ligne bleue de Vosges.
Au fur et à mesure que l’on approche de la période de Noël, les villes s‘habillent de lumière, les marchés de Noël s’installent sur les places de villes et des villages, et dans les vitrines des boulangers pâtissiers, apparaissent des fabrications que l’on ne trouvent qu’à cette période-là.
Ces sont les « Mannalas » qui débarquent en premier. Les « Mannalas » sont des bonshommes en brioche que l’on déguste avec un peu de beurre. On les trempe souvent dans un chocolat ou un cacao bien chaud. C'est également la période des "Bredala", les petits gâteaux fabriqués par les ménagères.

Vous apercevrez aussi  les fameux «Beerawecka » : les pains aux fruits.
Passé Noël, toutes ces friandises disparaîtront pour revenir l’année suivante, comme par enchantement.

Un peu d’histoire :

On raconte bien des histoires sur l’origine de ces « beerawecka ». On essaie de justifier une origine et certains se tournent tout naturellement vers la linguistique.
« Beera »  désigne la poire.
« Wecka » signifie le pain enfin une forme de pain pour être plus précis.
« Beerawecka » serait donc tout naturellement l’association des deux mots et signifierait le pain aux poires et par extension le pain aux fruits.
Cela semble logique donc véridique.

Malheureusement, il n’en est rien !

Voyons cela d’un peu plus près.

L’Alsace a toujours été une terre de passage. La région est même un passage obligé des migrations Nord Sud. Or, parmi les gens qui étaient obligés de fuir, il y a ceux qui étaient poursuivis pour des raisons religieuses. C’était le cas des « juifs ». Mais, comme je vous l’ai dit, l’Alsace est une terre accueillante et de nombreux juifs se sont installés dans la grande vallée entre les Vosges d’un côté et la Forêt Noire de l’autre. L'Alsace terre de tolérance, terre œcuménique.

Ces gens là parlaient une langue appelée « yiddish » qui comprend beaucoup d’emprunts aux langues et dialectes locaux.

Les juifs, peuple qui voyage, ont des traditions bien ancrées. Et quand on voyage, on emporte avant tout des choses indispensables, des choses pratiques, nourrissantes. C’est ainsi qu’ils fabriquaient des gâteaux pour le voyage. On mettait dans ces gâteaux, des choses nourrissantes comme des fruits secs parce qu’ils se conservaient facilement.

C’est en souvenir de ses voyages, que pour le peuple juif, Pâques est la fête la plus importante.
Pâques   se dit Pessa’h

Le gâteau de Pâques : Pessa’h wecka.
Voilà la vraie origine.
Mais à force de se cotoyer, les traditions se mélangent et les chrétiens ont repris à leur compte le fameux gâteau qui de Gâteau de Pâques est donc devenu gâteau de Noël.

Le Beerawecka a conquis tous les pays de l’Est parce que sa fabrication n’est pas difficile. On en trouve, dans toute la vallée du Rhin, en Autriche, en Suisse. Il comprend des fruits secs que l’on pouvait préparer soi-même en séchant des fruits au moment des récoltes. De plus, le gateau présente l'avantage de se conserver longtemps.

Mais attention aux mots :

Ils changent dès que l’on fait quelques kilomètres.
Dans le Haut-Rhin, on dit Beerawecka. ( avec 2 e)
Dans le Bas Rhin, on dit Berewecke.( 1 seul e)
Sauter parce dessus le Rhin et l’on vous parlera de Hutzelbrot.  
«Hutzl" désigne à la fois les  poires sauvages dures mangeables à condition de les cuire longtemps, ou les fruits des conifères.
Dans la vallée d’Orbey, où était venue de réfugier le peuple  Welche (apparenté aux Basques) on parle de Hogey et du côté de Munster on appelle le Beeraweacka «Schnitzwecka ».
Mon ami Joseph, grand féru d'histoire alsacienne, et plus particulièrement d'histoire de la province du Sud : le Sundgau, m'a rappelé que jadis, les juifs du village étaient les grands spécialistes de la préparation des Beerawacka. Chaque année, pour nouvel an le parrain offrait un Beerawecka comme cadeau.

C'est donc parce que le Beerewecka est si populaire, si estimé, que les gens l’ont adopté et lui ont donné un nom.
A bien regarder, la fabrication des Beerawecka est simple.

– des fruits secs
– une pâte fortement épicée.

Avec si peu de renseignements, ne vous étonnez donc pas, si les variations de recettes sont innombrables ; chacun étant d’ailleurs persuadé de détenir la vraie recette.

Comme je vous l’ai déjà souvent rappelé, inutile de chercher la vraie recette originale. Chaque  ménagère faisait avec les ingrédients qu’elle avait sous la main. De plus, les recettes se transmettaient de bouche à oreille, rien d’écrit, rien de figé, et chacun pouvait donc les adapter à son goût.

Voyons la recette :

Au départ : des fruits secs, souvent fabriqués soi-même.
En automne, quand il y a trop de fruits, on essaie de les conserver.
On coupe les pommes et les poires en tranches que l’on fait sécher.
Les quetsches sont dénoyautées et séchées mode pruneaux.
On réserve quelques belles grappes de raisin que l’on suspend afin qu’ils sèchent.

Et puis,  se rajoutent les fruits qui viennent d’un peu plus loin, c’est pourquoi ils font rêver : les dattes, les figues, des abricots parfois.
La nature semble également nous donner un coup de main en nous proposant, les noix, les amandes et les noisettes…

Faisons nos achats :

La première des choses qui me semble indispensable, c’est de vous mettre en garde.
Surtout, n’achetez pas trop.

– 100 g de pommes séchées.
– 100 g de poires séchées.
– 100 g de quetsche ou pruneau.
– 100 g d’abricots secs.
– 100 g de dattes.
– 100 g de figues.
– 100 g de raisins secs.
– 100 g de cerneaux de noix.
– 100 g de noisettes.
– 100 g d’amandes.

cela fait vite beaucoup sans compter l’alcool, la farine, les épices etc…

Comment préparer les fruits ?

Il faut les découper, ce qui n’est pas toujours facile, quand ils sont bien secs.
Alors, les petits malins commencent par faire ramollir les fruits pour les réhydrater et faciliter leur découpe.
Faire gonfler comment ?

Là vous avez le choix.
Si vos Beerawecka sont destinés à des adultes, réhydratez vos fruits dans un bon coup d’alcool blanc (quetsche, mirabelles, kirsch…)

Mais si vous voulez en donner à des enfants, il est certainement préférable de réhydrater les fruits dans un sirop (eau+ sucre).
Vous pourrez toujours ajouter un peu d’alcool pour les adultes.

On peut faire mariner les fruits toute une nuit, mais n’oubliez pas le micro onde. Il fait du bon travail. 

Quand les fruits sont bien ramollis et découpés, laissez-les égoutter.  Ne jetez pas le jus. Vous pouvez toujours le boire !

Préparation de la pâte :

Là, il faut tout d’abord faire un choix.

On peut utiliser :

– de la pâte à pain.
– de la pâte à pain de seigle.
– de la pâte un peu plus fine, genre brioche.

La pâte à pain :

500 g de farine type 55.
300 g d’eau.
1/2 cube de levure de boulanger.
1p de sel.

 

Mettre les 500 g de farine dans la cuve du batteur.
Emiettez la levure dans l’eau tiède (surtout pas chaude)
Versez l’eau sur la farine.
Laissez travailler lentement 10 minutes en vitesse lente.
Ajouter le sel à la fin.

La pâte à pain de seigle :

500 g de farine de seigle.
300 g d’eau.
1/2 cube de levure de boulanger.
1p de sel.
1 c.a.s. de sucre.

Travailler comme la pâte à pain blanc en mélangeant le sucre à la farine. Le sel toujours en dernier.

 

La pâte fine style brioche :

500 g de farine type 45.
1 œuf.
1 autre œuf pour la dorure dorure.
250 g de lait tiède.
1 c.a.s. de sucre en poudre.
100 g de beurre pommade.
1 p de sel.

Versez la farine dans la cuve du batteur.
Ajouter un œuf.
Ajoutez le sucre et la pincée de sel
Diluer la levure ans le lait tiède (surtout pas chaud)

Faites tourner.
Quand la pâte est bien homogène, ajoutez le beurre pommade.

Dans tous les cas, il faut bien épicer les pains aux fruits avec cannelle, anis étoilé en poudre, grains d’ais vert, curcuma, clou de girofle, pointe de 4 épices… ou tout simplement un mélange pour pains d’épices.

Quelle que soit la pâte ; il faut la faire lever dans un endroit tiède.
Quand elle aura doublé de volume, il faut la rabattre, c’est à dire la retravailler une seconde fois.

Ensuite, on mélange les fruits et la pâte et on forme les «pains».
La levure va les faire doubler.
Les dorer avec de l’œuf.
Les décorer avec quelques amandes…
Laisser cuire à 180°C.

Vérifier la cuisson avec la lame d’un couteau.
Vérifiez la cuisson avec une aiguille à brider ou un couteau pointu.
Les pains aux fruits sont cuits quand il ne reste plus de pâte collée à la lame.

Laisser refroidir sur une grille.

Les pains aux fruits méritent qu’on leur accorde un temps de maturation. Le goût devient meilleur quand ils vieillissent (surtout à l’abri des gourmands).

Dégustation :

Les pains aux fruits se mangent sans faim pour le plaisir de sentir les saveurs et les odeurs.


Petite idée :

Découpés en tranches fines, les pains aux fruits accompagnent à merveille le foie gras.
 

Bon appétit.

En attendant mes propres photos… cliquez ICI
Regardez la diversité des formes, des couleurs, des aspects. C'est bien la preuve que chacun peut interprêter la recette à sa guise.

 

Illustration : le film de la rectte cliquez ICI


 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

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