LES LEGUMES EN GASTRONOMIE 

Je vous livre quelques réflexions concernant la place des légumes dans la grande gastronomie.

A part quelques exceptions, les légumes ont longtemps été servis en accompagnement.
Notons toutefois, que les viandes, produits vedettes de la gastronomie, commencent à perdre leurs prestiges depuis quelques années par un glissement vers d’autres philosophies alimentaires : végétariens  et autres vegans.
Il existe maintenant des chefs qui mettent les légumes au centre de leurs menus pour répondre à une nouvelle demande de la clientèle.

Accompagnement ou produit principal, nous allons parler des légumes et de la philosophie de leur préparation en gastronomie.

EN GASTRONOMIE, LE CLIENT EST ROI .

Chacun interprétera cette affirmation comme il lui convient, toujours est-il que le client, me semble-t-il doit être au centre de nos préoccupations.
Le client a droit à ce que l’on fait de mieux, légumes les plus frais et les fruits plus beaux, en pleine maturité, produits carnés dépouillés de tout ce qui risque de nuire  leur qualité.

Nous avons décidé de parler des légumes, alors restons-y !

– cueillette et consommation en pleine maturité,
– circuits d’approvisionnements courts.

sont deux critères essentiels.
Il faut, dans la mesure du possible, éviter de manger à contre saison.

OBLIGATION DE MISES EN ŒUVRE DE TECHNIQUES PARTICULIÈRES :

Manger des carottes dans un restaurant d’entreprise et manger les mêmes légumes dans un restaurant gastronomique semble a priori « être du pareil au même »

Or, il n’en est rien.
Bien que le légume soit le même, la présentation, le mode de cuisson, l’assaisonnement parfois peuvent différer totalement.

Il convient d’analyser le fonds du problème.

En restauration d’entreprise, il faut avant tout nourrir le client.
Celui-ci attend de calmer sa faim, tout en satisfaisant un besoin de plaisir.

En restauration gastronomique, le client est avant tout à la recherche du plaisir de manger. La satiété passe au second plan.
Il m’est arrivé de ne pas être content et de le faire savoir.
Je ne vous cache pas que mes remarques n’ont pas toujours été bien accueillies.

Revenons donc à l’exemple des carottes pour mieux expliquer.

On peut considérer que la Nature, n’est finalement qu’un vaste « restaurant » ou jardin dans lequel il suffit de se servir. C’est du moins ce qui se passait avant l’invention de la cuisson des aliments.
Mais l’Homme n’est jamais totalement content. Il est toujours à la recherche d’un mieux, d’un plus facile etc…

Et il existe des personnes plus ou moins douées pour préparer les aliments.
On les appelle des cuisiniers.
Et ces cuisiniers ont le choix de pousser à bout le perfectionnement de leurs techniques, ou de se contenter du train-train habituel.
Bien sûr, ils essaient de se faire payer au juste prix, c’est-à-dire d’obtenir un salaire de reconnaissance de leurs dons et de leur travail.

Si vous poussez ce raisonnement au bout, vous verrez apparaître à travers les siècles, toute une série de lieux dans lesquels on servait à manger.
Toute une série de professions aussi du cuisinier de maisons nobles ou bourgeoises, aux restaurateurs que nous connaissons aujourd’hui, du cuisinier de bistro, ou chef dûment étoilé.

Ce n’est finalement qu’une question de définition, je dirais presque une question de philosophie.
Cette philosophie consiste, entre autres, à choisir la place que l’on va attribuer aux clients.

Elle définira par conséquence le travail, les efforts que le cuisinier va accepter de faire.
L’espérance d’un salaire restera comme déjà évoquée, un paramètre important.

ET SI NOUS REVENIONS À NOS CAROTTES !

Et bien justement, allons-y.

Premier exemple : un restaurant d’entreprise ou une cantine.

Les carottes seront lavées, épluchées et relavées
Il existe des machines qui permettent de faire ce travail à grandes quantités.
Les carottes seront ensuite taillées, par exemple, en rondelles.
Il y en aura forcément de grosses et d’autres plus petites.

Cuisson :

Le chef a décidé de faire des carottes étuvées
Il mettra donc un corps gras dans une grande sauteuse.
Il pourra, s’il le désire, parfumer cette matière grasse avec quelques oignons émincés.
Du sel, un peu d’eau.
La cuisson est lancée.

Au moment du repas, les clients pourront choisir le type de viande et les légumes d’accompagnement : mettons : pommes de terre et carottes
Bon appétit.

Second exemple : un restaurant gastronomique

Au menu : carré d’agneau et sa garniture de légumes.

On aura acheté des carottes les plus fraîches possible.
Mais, comme la nature est caractérisée par la diversité, il y aura des carottes de différentes tailles.
Le chef désire que les carottes soient taillées de la même grandeur.
Il va donc demander à sa brigade de «  tourner » les carottes.

Voici donc cette fameuse technique : tourner des carottes. Voir ICI

A l’aide d’un couteau, un commis va tailler les carottes en forme de navettes et veiller surtout à ce qu’elles soient de la même taille.

Cuisson :

Le chef demande à ce que les carottes soient « glacées. » Voir ICI
Voici donc une seconde technique :

Les carottes seront posées dans un sautoir.
Elle seront recouvertes d’eau froide.
Sel, un peu de sucre et un morceau de beurre.

L’eau va se mettre à bouillir et elle va cuire les carottes.
Celles-ci vont prendre le goût de sel et de sucre.
En fin de cuisson, le beurre et le restant de sucre vont former une sorte de caramel et va entourer les carottes et les faire briller.

Au moment du repas, le carré d’agneau sera posé sur un plat, entouré des carottes, navets, etc. joliment glacés.

CONCLUSIONS :

Des carottes des deux côtés, il est vrai.
Mais, ni la même forme, ni le même goût.
Et surtout pas le même prix.

La cuisine est une forme d’alchimie moderne qui transforme des produits simples, en or du palais.

Une autre façon de concevoir le métier de cuisinier

Petite blague historique pour terminer.

Un jour madame Cro, épouse Magnon constata que son mari était revenu, une fois de plus, bredouille de la chasse.
Si c’est comme ça, tu iras faire les courses à …
Ici vient le nom d’un super marché du coin (publicité interdite)

Maugréant contre les femmes et leur descendance, M. Magnon s’exécuta craignant que son épouse ne lui fasse le coup de la migraine.

Quand il rentra, il était fatigué eu égard qu’il était tombé sur une caissière spécialement lente.
Il « balança » donc ses achats sur la table sans même déballer les sachets.

Or voilà que le destin s’en mêle.

Un sachet contenant une entre côté de dinosaure, tomba juste sur la gazinière qui était restée allumée.
Combien de fois dois-je te dire d’éteindre le gaz. On n’est pas à Versailles ici !

Le hasard fait parfois bien les choses.
L’entrecôte se mit à sentir bizarrement.
Je dirais même qu’elle sentait bon.

Et c’est comme ça que l’on inventa la cuisson.
Car une viande cuite, c’est quand même autre chose qu’une viande crue.
Vous ne croyez pas ?

PS

 

On n’a jamais pu vérifier la véracité historique de cette histoire, mais toujours est-il que vous cuisinez vos viandes
Non ?

Les illustrations photographiques sont soumises à © Jean-Paul Brobeck