LE TEMPS fils de l’ETERNITE

 

Au début, il y a de cela fort longtemps, le monde était vide. Il n’existait rien, absolument rien, ou alors, il n’y avait que le temps, mais il y en avait tellement, que même en cherchant bien, on ne pouvait en distinguer ni le début, ni la fin.
Je crois bien que c’était l’Eternité, l’immobilité aussi.

Comme il n’existait rien que le temps, et qu’on ne savait pas le mesurer, tout était autrement.
Le soleil ne savait pas à quelle heure il fallait se coucher, il continuait donc à briller, tout  là-haut, dans le firmament.

Pas de mesure du temps, pas de saisons non plus. Le ciel était bleu indéfiniment.

Alors Dieu se dit : “ il faudrait quelques couleurs “ et c’est ainsi qu’il inventa les fleurs.
les fleurs apportèrent leurs parfums et afin que tout soit encore plus gai, plus beau, Dieu inventa le chant des oiseaux.

Le soleil dit : “ j’aimerais bien me regarder “, alors Dieu inventa l’eau, les océans, les mers et les lacs afin que le soleil puisse s’y mirer.

L’eau, à son tour, dit : “j’aimerais voyager et faire du monde le tour."
Alors Dieu permit à l’eau de se mettre à couler.
De source en ruisseau, de ruisseau en cascade, par les torrents et les rivières, l’eau se mit à découvrir la Terre.

Elle sauta de pierre en pierre, bondit de rocher en rocher, fit la fête, se transforma en écume et, quand elle se retourna, elle aperçut au loin, le Soleil qui commençait à décliner. Là-bas, à l’horizon, montait comme un voile sombre.

Dieu venait d’inventer la nuit.

Alors toutes les choses comprirent que désormais, le temps s’était mis en marche et que personne, non personne, jamais ne pourrait l’arrêter.

C’est à ce moment-là, je crois bien, qu’apparurent les premiers hommes.
Ils vivaient dans ce qu’on appelle le paradis, n’ayant d’autres soucis que de cueillir les fruits.

C’est alors, qu’au fond de sa grotte, le Malin inventa l’ennui.

De jour en jour, les fleurs parurent moins belles, les fruits perdirent leur saveur.
On s’habitue à tout.
L’ennui avait pris possession des hommes et dévorait leur cœur.
Dites-moi, à quoi sert le temps, si l’on attend plus rien ?

Alors Dieu décida de sauver l’Humanité.
Un jour, un homme oublia de se réveiller. On eut beau lui parler, le secouer, l’âme avait quitté le corps.

Dieu venait d’inventer la Mort.

Il la cacha un peu partout : là-bas, dans les bois, au détour d’un chemin parfois, au fond du lac et dans l’éclair fulgurant.
La Mort était présente à chaque pas, à chaque instant, frappant au hasard, bien plus forte que la Vie.

Dans le cœur des hommes s’installa la peur, l’angoisse, l’incertitude.
Chacun voulait connaître son dernier instant.
Alors, ils se mirent à vivre intensément, à courir désespérément.
Mais personne ne peut échapper au temps.

C’est ainsi que Dieu donna sa valeur au présent.

Cette histoire, je vous l’ai dit, s’est passée il y a très longtemps.
Pourtant, les hommes ne cessent de courir après le temps.

Le temps est né de l’Eternité, seul le sage peut lui redonner cette qualité.

Car il faut apprendre à vivre au rythme de son cœur,
Pour connaître le vrai bonheur
Et devenir plus fort que la peur.

 

Goutte