LE PHOTOGRAPHE : CUEILLEUR DE LUMIERE

Tout est parti, l’autre jour, d’une grosse discussion avec une amie :

« Dis-moi, fait-on encore de la photographie argentique ?
– pourquoi cette question ?
– parce que j’ai encore un reflex argentique qui dort dans une armoire. Tu sais, un de ces appareils avec lequel j’essayais de capturer la lumière.
– Tu fais encore de l’argentique ?
– J’ai de plus en plus mal à trouver des films et puis les laboratoires qui développent sont de plus en plus rares. C’est bien dommage d’être passé au numérique ! Moi, je regrette mes anciens films.

Petit moment de silence.

– tu sais, le numérique nous permet de faire des choses auxquelles nous n’osions pas même rêver.
– oui, je sais : la manipulation.
– comment ça la manipulation ?
– je pense à tous ces photographes qui travaillent n’importe comment et qui « bricolent » ensuite leurs images sur l’ordinateur.
– tu penses que ce sont des photographes ça ?
– moi, j’ai gardé la nostalgie de la lumière. J’ai gardé des souvenirs de regrets quand la lumière changeait tellement vite que je n’avais pas même le temps de sortir mon appareil.
– et tu penses, que le numérique a profondément changé les données du problème ?

… / …

 

Il est vrai que le numérique a profondément bouleversé la photographie.
Mais, si le numérique a tellement vite pris, c’est que quelque part, on l’espérait, c’est que les photographes attendaient de nouvelles techniques, de nouvelles possibilités.
Il convient pourtant de garder la tête froide afin d’analyser correctement.

La photographie numérique n’a vu le jour qu’à partir du moment où l’usage des ordinateurs a commencé à se démocratiser.
Un appareil numérique sans ordinateur, ne sert à rien.
Il n’est alors qu’un simple appareil photographique différent parce qu'il stocke des images non plus sur un film, mais sur un autre support : la carte magnétique.

Appareil photo numérique et ordinateur vont de paire.
L’ordinateur vient remplacer le laboratoire. On a toujours été obligés de développer ses photographies. La seule différence, c’est que maintenant on ne s’enferme plus dans l’odeur des produits chimiques des laboratoires. Même à la grande époque des laboratoires, on a toujours essayé de tirer le maximum des prises de vues. Alors sont nées les techniques de maquillage qui faisaient danser les doigts pour moduler la lumière provenant de l’agrandisseur. Et ce n’étaient pas les seules techniques. On frottait aussi le papier photographique pendant qu’il baignait dans le révélateur. On avait remarqué que la chaleur permettait de faire apparaître des détails dans les parties surexposées.

Ces techniques-là, n’étaient pas considérées comme des « traficotages ». Elles faisaient parties intégrantes du savoir-faire d’une profession qui a presque entièrement disparue : les tireurs.
Ces gars-là, savaient faire du bon travail.
Il ne faut pas imaginer que les « grands photographes » qui sont entrés dans l’histoire, s’amusaient à perdre du temps dans les laboratoires. Ils confiaient leurs films aux tireurs des laboratoires et ce sont des gens-là qui « sortaient » de belles images.

Le numérique n’a rien changé.
Le grand public confie ses cartes magnétiques à des laboratoires qui développent et tirent sur papier. Il existe toujours des « spécialistes » du développement seulement maintenant, ils sont assis devant des ordinateurs.
Il faut bien sûr qu’ils aient quelque chose à développer et c’est là que les choses deviennent intéressantes.

La plupart des appareils destinés au grand public travaillent dans le format JPEG.
Le JPEC est à la fois, une bonne et une mauvaise chose.

Je m’explique :

Au début, disons il y a quelques années encore, le stockage des photographies sur cartes mémoires posait quelques problèmes.
Les cartes étaient petites. (1 Go). Elles étaient surtout très chères.
Les tout premiers appareils numériques prenaient 1 voire 2 photographies.
On a donc toujours essayé de réduire non pas la taille des photos mais le nombre des informations. On s’est aperçu qu’il existe des informations plus ou moins importantes. Alors, des chercheurs ont mis au point le format JPEG qui n’utilise qu’une petite partie des informations. On ne garde que l’essentiel, l’indispensable. Les autres informations sont éliminées et perdues à tout jamais.
C’est un peu comme un gars qui veut construire un mur et qui commande un camion de sable.
Quand le camion apporte le sable, le gars en prélève quelques pelletées et dit : "vous pouvez jeter le reste."

Travailler en JPEG, c’est un peu construire le fameux mur.
Mais cela va encore plus loin, car chaque fois que l’on reprend la photographie, il y a une nouvelle perte, si bien qu’à la fin, rien ne va plus.
Il existe heureusement une autre solution : le format RAW (signification « cru »).
Le format RAW enregistre toutes les informations. On obtient donc un fichier très volumineux.
Ce format peut être développé sans perte et il peut même être sauvegardé. Les photographes ont donc la possibilité de retrouver
une sorte de « négatif ».
Ce négatif peut ensuite être re-développé autant de fois que l‘on désire et donner toutes les variations que l’on veut.

L’ennui, est d’ordre commercial, car le format RAW n’a pas été déposé officiellement. Chaque marque possède donc son format RAW.
CR2 chez Canon, NEF chez Nikon pour ne citer que ces deux marques.

Heureusement, il existe un format RAW multiplateforme. ADOBE, met gratuitement à la disposition un ADOBE DNG CONVERTER , lire Adobe négativ digital
Grâce à ce logiciel, vous pourrez développer et sauvegarder les différents formats RAW.

 

Pour le reste, la photographie, la vraie, celle des amateurs et des professionnels passionnés, est restée fidèle à elle-même.
Si photographier est étymologiquement « dessiner avec de la lumière » le photographe continue la chasse aux photons : vous savez ces petits « trucs » dont on ne sait pas bien si ce sont des particules, des grains, ou des rayonnements.

Qu’importe d’ailleurs.
Ils existent.
Et nous autres photographes, nous essayons de les capturer, de les mettre en boîte pour pouvoir les montrer, les faire danser, les ressusciter quand nous partageons nos images.

 

J’ai toujours dit à mes étudiants :

« Il me faut quelques mois pour vous apprendre les techniques photographiques, et le reste de votre vie pour former votre regard. »


Un photographe respectueux devrait conjuguer le verbe photographier au presque que parfait.

 

Signat

 

n&b7

La lumière,
Matière première des photographes
C’est avec elle que nous écrivons d’après l’étymologie.

La lumière,
C’est elle que nous traçons.
C’est elle qui nous fait lever de bon matin.

La lumière 
Celle qui danse, qui envoute, qui enchante.
Celle qui anime, qui donne vie.

n&b1

C'est l'heure où dame nature
regarde son visage dans le miroir de mercure.
 

 

 

 

 

 

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