ANECDOTE DES FRAISES DES BOIS

Rappelez-vous mon anecdote des gratte-cul.
Ah bon ! Vous ne vous en souvenez pas !
Alors, ça sert à quoi, que je vous raconte des histoires, si vous n’écoutez pas ?

Non, je ne vais pas vous la raconter une seconde fois.
Prenez le temps de cliquez ICI.

Donc je disais (j’espère que vous écoutez maintenant) que les Alsaciens sont tellement proches de la Nature, qu’ils ramassent tout ce qu’elle leur offre.

Fin juin, c’est le tour des….., alors le tour de quoi ?
– des fraises des bois !
Mon Dieu ! Faut tout leur dire.

Pas facile la cueillette des fraises des bois.
On croirait qu’elles prennent un malin plaisir à garder des tiges très courtes.
Alors oui, pour se baisser, il faut se baisser
Et, comme de plus, elles sont toutes petites, il faut se baisser un sacré nombre de fois pour en remplir ne fut-ce qu’un petit récipient.

Mais quelle récompense !
Un pudding vanille, décoré de fraises des bois !

Goûtez, et je vous jure que vous ne dormirez pas, tellement qu’il va vous hanter ce dessert.
Du quatre étoiles pour gens simples, gratis de surcroît, que dis-je : du quatre étoiles mieux que ça, toute la voix lactée en une fois.

Mais que voulez-vous, il y a toujours des gens qui détournent les choses.
Je me suis laissé dire que si les fraises de bois se donnaient de la peine à s’exposer en plein soleil, c’est pour rougir et vous offrir ce parfum et ce goût qui, à leur tour, vous feront rougir, mais de plaisir.

Mais voilà, il existe des gens qui ne font pas le détail et qui « balancent » des fraises des bois dans le tonneau dans lequel macèrent les fruits, qui, une fois le temps venu, seront distillés en alcool : le Schnaps.
Sauvages !

Vous vous rendez compte de ce quelle subit la fraise des bois !

D’abord dans le tonneau, la grêle fraise des bois, délicate comme une jeune fille qui se réveille  à côté de quetsches, de cerises, éventuellement de poires qui fermentent.

Et puis les choses ne s’arrêtent pas là, on va l’enfermer dans la cuve de l’alambic.
On va la chauffer pour lui soustraire son âme et cette âme va s’envoler dans la colonne de distillation.
Un coup de froid et hop ! Elle va se condenser.

Adieu la belle couleur rouge, maintenant, elle s’est transformée en liquide carrément transparent. Et ce liquide pique et vous enivre.

Sauvage : oui je le redis !
Quoique, je ne crache pas sur un petit verre à l’occasion, et pas de limonade, s’il vous plaît.

Que voulez, l’Homme est plein de contradictions !

Alors vous venez. ?

Je vous invite à me suivre à la cueillette des fraises des bois.
Mais où faut-il les chercher ?

Et bien, la fraise des bois aime bien le soleil.
C’est donc dans les clairières et les pentes déboisées que vous avez le plus de chances d’en trouver.

Emportez un récipient mais, je vous conseille, prenez-en un qui ne soit pas trop grand.
Ah, au fait, il serait prudent de choisir un récipient avec couvercle.
Ce serait dommage de perdre vos fraises en trébuchant.

Et les voilà partis, enfin je veux dire Georges et son épouse Mélanie.
Voici une belle pente récemment déboisée. Les fraises des bois ont déjà commencé à la coloniser.

« On va aller chacun de notre côté » dit Georges à son épouse, et, de temps à autre, je reviendrai te voir. »
Et le voilà parti !

Au début, tout alla bien. Mélanie trouva pas mal de fraises, mais sa gamelle ne se remplit que très lentement, car elle en mange de bon appétit.

Au bout d’une demi-heure Georges vient la rejoindre :
«  Alors, tu en trouves !
– Oui, mais pas beaucoup. C’est fatigant de se baisser
– Moi, j’ai trouvé un filon. Regarde ! »

Et le Georges fier comme Artaban, brandit son récipient plein à ras bord.

«  Alors ça ! Mélanie en reste bouché bée.
– Faudrait presque aller chercher le seau dans la voiture.
– J’y vais, s’exclame » Mélanie, contente de faire une pause.

Elle va donc chercher le fameux seau dans la voiture.
Un observateur avisé aurait remarqué qu’elle avançait d’un pas, comment dire, nonchalant, très peu pressée de reprendre la cueillette.

Toujours est-il qu’elle venait juste de revenir quand le Georges rapporta une seconde gamelle pleine de fraises.

« Alors-là ! On dirait que tu as cherché des fraises des bois toute ta vie s’exclame-t-elle.
– Non, non, répond le Georges, j’ai tout juste trouvé une bonne place. »
Et il disparaît.

Le manège continue encore plusieurs fois, si bien que le seau finit par se remplir.
Vous imaginez cela : un seau plein de fraises des bois, en pas même  trois heures de cueillette !

Le soleil continue à grimper dans le ciel.
On approche de midi.

«  Et si nous allions déjeuner » lance le Georges.
«  Je commence à avoir faim » répond Mélanie.

Alors, Georges prit le seau et ils partirent en direction de la voiture garée à l’ombre,  dans le chemin forestier.

Ils avançaient sur le chemin quand soudain, ils rencontrèrent un individu hirsute.
L’homme tenait un seau presque vide à la main.

«  Bonjour, vous avez cherché des fraises de bois ? » lança-t-il.
– Bien oui, mais quel travail ! Faut avoir le courage de se baisser » répondit le Georges
– Moi, je cherche depuis six heures ce matin, mais il y a un truc que je ne comprend pas ; plus je mets des fraises dans le seau, plus elles disparaissent.
J’aimerais savoir pourquoi. »

– Vous avez pensé au renard dit Georges, les renards à ce que l’on dit, adorent les fraises de bois. Qui sait il y a peut être un renard dans la forêt ?
Vous avez surveillé votre seau ?
– je ne vais pas m’encombrer de mon seau. Je l’ai posé à l’ombre et chaque fois que ma gamelle est pleine, je viens la vider. Et chaque fois, il y a moins de fraises.
Je ne comprends pas ! Je vais encore chercher un peu, mais je désespère. »

Et l’homme disparut.

«  Je ne savais pas que j’avais épousé un renard lançe Mélanie.
J’ai compris !  La bonne place, c’est le seau du Monsieur. Tu n’as pas honte !

– Il n’a qu’à surveiller son seau !

Quand ils rentrèrent chez eux, Mélanie prépara un pudding vanille, avec tout un litre de lait.
Elle le mit au réfrigérateur pour le refroidir plus rapidement.

Le couple passa la soirée devant la télévision et, pendant les publicités (oui, je sais, il y en a de plus en plus), Mélanie servit le dessert : un pudding vanille, entouré d’une couronne de fraises des bois parfumées .

Un délice que je vous dis !

Mais, le seau était grand, tellement grand, qu’il restait beaucoup de fraises.

«  Que vais-je faire de toutes ces fraises ? » lança Mélanie
– Tu n’as qu’à en faire des confitures. »

Et Mélanie se mit au travail.
« Georges, il faut aller chercher trois kilogrammes de sucre »
Er le Georges enfila ses chaussures, en maugréant contre les femmes.

Toujours est-il que faire des confitures, ce n’est pas rien.

Mais le pire, vous ne le savez pas.

Les confitures une fois terminées, ils allèrent se coucher en se réjouissant de les goûter le lendemain matin au petit déjeuner.

Et c’est là, que le drame arriva.
Georges avait bien beurré quelques tartines et quand je dis bien beurré…Une couche épaisse comme ça.
La Mélanie ne put s’empêcher de lui rappeler son taux de cholestérol

Sur la couche de beurre épaisse, il tartina une couche encore plus  épaisse de confiture de fraises des bois.
Puis, il ouvrit sa bouche toute grande (on dirait une porte de grange, si si) et il enfourna la tartine
Une première bouchée… et il recracha
« C’est carrément dégueulasse » lança-t-il !
Tu es sûre d’avoir mis du sucre ?
C’est amer, mais alors amer.

Je ne peux m’empêcher de laisser vagabonder mon imagination.
Juste au-dessus de la maison de Georges et de Mélanie, il y a un gros nuage, vous savez, ces nuages en forme de chou fleur.

Regardez bien.
Vous ne voyez rien ?
Mais si, regardez mieux.

Moi, j’y vois comme un visage, un visage d’un monsieur âgé qui sourit de toutes ses dents, dans une grande barbe blanche.
Il regarde, on dirait avec un certain contentement ; le couple aux prises avec la confiture amère.

Quoi, vous ne savez pas ?
Les fraises des bois ne supportent pas la cuisson.
Elles deviennent amères

Comme pour punir ceux qui ont été malhonnêtes
Et là-haut, dans son nuage, le visage sourit, sourit…

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